•  Planche d’instruction du grade à l’occasion de l’Initiation de M. L. 

     

    Vénérable Maître,

    Mes très chers Frères,

    Mon très cher Frère Marc,

     

    Notre Loge se réjouit car elle vient de célébrer une nouvelle entrée en Maçonnerie. Elle a revêtu ses plus beaux atours et a pris son air de fête pour te recevoir en tant que nouvel Apprenti. Lorsque le bandeau qui couvrait tes yeux a été enlevé, la Lumière s’est répandue dans le Temple et tu auras sans doute ressenti, un peu confusément, que la Réception d’un nouveau Frère Apprenti est un événement important dans la vie d’une Loge maçonnique.

    Tu viens, en effet, de commencer à prendre ta part de Travail des Maçons, travail symbolique qui ambitionne de construire le temple de la Vérité et de la Sagesse. Car les Francs-maçons, mon Frère, ont un idéal qui ne s’appuie sur aucun dogme auquel ils seraient tenus d’obéir et de croire aveuglément.

    Cet Idéal, ils le poursuivent sans préoccupations intéressées, non pas dans l’espoir d’une récompense sur Terre ou dans un autre monde, ni dans la crainte d’un châtiment s’ils s’en écartaient. Non ! Ils s’attachent à cet Idéal parce qu’ils estiment que la justice dans l’égalité, la sagesse dans la bonté sont des devoirs humains, et même naturels, et que la pratique de ces vertus porte en elle sa récompense la plus directe et la plus effective.

    L’accession à la Maçonnerie est bien une forme de privilège qui va te permettre d’être en droit d’éprouver un sentiment de fierté légitime. A cette fierté correspond la joie de ceux qui l’ont accueilli…  pour toujours !

    La Maçonnerie est profondément imprégnée d’un esprit fraternel que tu découvriras progressivement au contact de tes Frères. Cet esprit ne s’obtient réellement que par un travail incessant. Et c’est une joie pour nous tous de te voir dès cet instant prendre en main nos outils symboliques.

    Te voilà donc initié, MTCF Marc ! Tu viens d’être créé, consacré et reçu Franc-maçon. Et pourtant cette cérémonie ne suffit pas, nous le savons tous, pour faire de toi un Maçon. Il te faudra sans doute toute une vie maçonnique pour entrevoir une réponse, non dogmatique, à la question « qu’est-ce que cette Initiation que je viens de vivre ? ».

    Tu t’apercevras probablement très vite que cet esprit qui anime la Franc-maçonnerie peut rivaliser avec la plus belle et la plus altruiste des philosophies parce qu’elle veut mettre toutes les croyances sur pied d’égalité, pourvu qu’elles soient non dogmatiques, c’est-à-dire indulgentes et sincères.

    Tu ne tarderas pas à sentir que le code d’honneur des Maçons est vraiment l’un des plus beaux, l’un des plus limpides. Le respect du code d’honneur implique, bien sûr, des devoirs, des devoirs de respect des lois maçonniques, des devoirs de fraternité, de solidarité et de tolérance entre Frères et à l’égard des personnes qui les entourent dans la vie quotidienne.

    Si cela ne fait pas de nous des anges, au moins la Maçonnerie nous apprend à nous débarrasser peu à peu de nos plus gros défauts. C’est ce que nous appelons « tailler notre Pierre ». Chacun poursuit ensuite son propre chemin initiatique. A condition de ne jamais s’arrêter de progresser, donc d’aller le plus loin possible, il procure au moins de sérieuses victoires sur soi-même. Voilà un des plus grands secrets de la Franc-maçonnerie : c’est une initiation poursuivie sans relâche ; c’est le voyage lui-même qui compte et non pas son but.

    Etre Maçon, c’est donc être profondément humain dans la bonté, la justice et la tolérance, dans l’amour du Bien et du Vrai. C’est ce secret que nous sommes venus chercher ici, tous étant ce que nous sommes ; c’est ce secret que nous espérons que tu nous aideras à chercher, pour ton bien…  comme pour le nôtre.

    Nous savons que tu te souviendras longtemps de la cérémonie que tu as vécue et que tes souvenirs se préciseront surtout lorsque tu auras participé à l’admission d’autres néophytes dans ta Loge et dans notre Ordre, la Franc-maçonnerie traditionnelle, qualifiée de « régulière ».

    A l’issue de cette cérémonie, tes impressions sont certainement confuses, d’autant plus que tu as pénétré dans ce Temple les yeux bandés et que tout est neuf et probablement inattendu pour toi. Mais sache que l’Initiation au grade d’Apprenti est la plus belle et sans doute la plus riche en substance de toute une vie maçonnique.

    Consciente de ses devoirs et après une approche prudente, la Loge a jugé, en toute humilité, que tu étais digne de la rejoindre. Tu as frappé à la porte du Temple et c’est ainsi que, dans les ténèbres, grandes te furent ouvertes les portes de la Loge.

    Que fallait-il t’apporter ? « La Lumière ! » fut-il répondu. Et la lumière te fut donnée ! La Lumière t’a été donnée, symboliquement. La Vraie Lumière ne te viendra cependant pas tout d’un coup. Avais-tu vraiment conscience de vivre dans les ténèbres ? Connaissais-tu ta quête ? De même que tes yeux ont dû s’accoutumer à la lumière qui a jailli, de même, ta personne devra s’habituer progressivement à l’idéal maçonnique qui est loin de t’avoir été révélé dans son entièreté par ton Initiation : ce n’est pas en quelques instants qu’on devient plus sage et meilleur. C’est par un travail continu parmi tes Frères, avec eux, mais surtout, par un travail opiniâtre sur toi-même. C’est seulement ainsi que tu pourras accéder à une connaissance plus grande et plus complète d’abord de toi-même, puis d’autrui.

    Car c’est en jugulant le repos complaisant et confortable des habitudes égoïstes qu’on perçoit ce qu’on peut apporter à d’autres, peut-être moins favorisés. En les aidant, en leur tendant une main secourable, en les guidant s’ils le demandent, le Maçon augmente la richesse et la perfection dans son cœur.

    La lumière donnée est donc l’une des clefs d’un enseignement symbolique destiné à nous élever. Mais à nous élever vers quoi ? Que venons-nous chercher en Loge ? Est-ce seulement la présence d’une main tendue dans les ténèbres qui conforte notre solitude ? Ou est-ce plutôt parce que cette main tendue affirme détenir un secret ? Quel secret ? Quelle clef ? De quelle porte ? De quel domaine bien clos ?

    Certains caressent l’opportunité de meilleures relations d’affaires, source possible de plus grand confort matériel. Dans notre Obédience régulière ils seront déçus. Certains rêvent d’acquérir un pouvoir occulte leur assurant l’emprise nécessaire à asservir leurs semblables. Ils ne renforcent que leur propre esclavage. D’autres encore, mécontents de leur position sociale, viennent chercher dans nos temples le baume à leurs vaines ambitions. Ils n’engraissent que leur ego.

    Mais, fort heureusement, le plus grand nombre de Frères, tenaillés par cet insatiable « pourquoi », perdus dans leurs méandres métaphysiques, ayant épuisé les règles scientifiques, viennent finalement échouer aux parvis de nos Loges, aux portes de ce Temple qui prétend détenir la Connaissance. Dans la solitude de ta nuit, tu as frappé à la Porte du Temple et, dans un moment d’acceptation totale, tu t’es abandonné librement entre les mains de tes futurs Frères.

    Avais-tu réfléchi à ce que tu découvrirais en Franc-maçonnerie ? Ce que tu viens de découvrir correspond-il à ce que tu avais imaginé avant ton Initiation ? Au soir de cette cérémonie, il est sans doute encore un peu tôt pour donner une réponse car ce que tu découvriras en Franc-maçonnerie, c’est un perfectionnement de toi-même des points de vue sagesse et moral parce que c’est là notre ambition de devenir meilleur et de rendre meilleurs, c’est-à-dire plus complètement humains.

    Nous ne prétendons pas te donner plus de science dans quelque domaine que ce soit mais bien de t’aider à t’épanouir dans le domaine du Bien et du Beau. Notre Ordre, dans sa Constitution, se définit comme « une association initiatique qui, par son enseignement symbolique, élève l’homme spirituellement et moralement et contribue ainsi au perfectionnement de l’humanité par la pratique d’un idéal de paix, d’amour et de fraternité ».

    Alors, mon très cher Frère Marc, souviens-toi toujours que la Franc-maçonnerie vise au bonheur de l’Humanité par le perfectionnement des personnes, que notre Institution travaille à l’amélioration de l’Homme par la réflexion personnelle, en lui offrant une ambiance et des outils symboliques d’un usage universel.

    Tu nous as promis de nous apporter ton concours sans restriction aucune. Car personne ne peut être poussé vers le Bien et le Beau s’il ne désire ardemment y accéder. De ta propre impulsion, tu devras t’y engager résolument, car ce ne sont ni des mots ni des gestes rituels qui feront de toi un Maçon : c’est un devenir continu et persévérant. C’est un travail permanent et de longue haleine que de tailler et polir la Pierre brute, sa Pierre brute.

    Tes Frères te font confiance, MTCF Marc. Ils te tendent la main. Tiens-la fermement et pars avec eux vers cette Lumière qui te guidera, qui deviendra toujours plus grande, plus forte et qui réchauffera toujours plus profondément ton cœur.

     

    R :. F :. A. B.

    Orateur


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  •  Approche du symbolisme des bijoux maçonniques 

    Les décors et les bijoux maçonniques

    La désignation « décors maçonniques des Frères » recouvre généralement les accessoires de l’habit du Maçon que sont les sautoirs, cordons, bijoux et baudriers. Puisqu'ils servent à spécifier chaque office (comme par exemple « Maître des Cérémonies », « Trésorier », « Couvreur »…), ils appartiennent à l’habit du Maître. En effet, mise à part la médaille de la Loge, les décors restent du domaine de la Maîtrise.

    Pour peu que le Néophyte ait été attentif – malgré ses premières émotions – il aura pu constater qu’un bijou est accroché au sautoir de chacun des Officiers Dignitaires, même si à ce moment de son parcours maçonnique, il ne sait pas encore ce qu’est un sautoir ni un Officier Dignitaire !!!

    En Maçonnerie, le mot bijou couvre plusieurs domaines : les bijoux mobiles, les bijoux immobiles et le bijou de la Loge.

    Les bijoux maçonniques

    De nombreuses questions peuvent nous venir à l’esprit à propos des bijoux maçonniques, quant à leur objet, leurs sortes, leur nombre, leur rôle :

    • Qu’est-ce qu’un bijou au sens maçonnique du terme ?
    • Pourquoi porte-t-on un bijou de Loge ?
    • Depuis quand porte-t-on un bijou en Loge ?
    • A quoi servent les bijoux portés en sautoir par les Officiers Dignitaires ?
    • Qu’est-ce qu’un sautoir ? un baudrier ?
    • Pourquoi certains Frères portent-ils parfois plus qu’un bijou ?

    Les confusions éventuelles proviendraient d’une mauvaise traduction des rituels anglais en français. Le mot « jewel » signifie en anglais aussi bien bijou que joyau ! Mais dès les premières divulgations, c’est le mot bijou qui a été utilisé et retenu pour les deux significations. Cette confusion est d’autant plus dommageable que le mot bijou vient du breton « bizou » qui signifie « anneau pour le doigt », dérivé de biz qui signifie doigt. Son étymologie ne recèle ainsi aucun rapport avec l’utilisation qu’en a fait la Maçonnerie.

    Pour éviter la confusion, il faut revenir au rôle du bijou par rapport à la fonction créatrice. Le bijou a la tâche de mettre en avant la fonction. Le porteur d’un bijou doit passer par des mutations. D’où l’importance des grades d’Apprenti et de Compagnon qui construisent l’être pour résister à cette activité épuisante qu’exige la fonction.

    En Maçonnerie, précise Christian Guigue, les bijoux sont les emblèmes d’une fonction, d’une charge : Officier Dignitaire d’une Loge, Grand Officier de l’Obédience,

    Officier Dignitaire dans d’autres corps maçonniques.

    Ces bijoux doivent – idéalement – être fabriqués dans un métal « noble » comme l’argent, le vermeil ou l’or. Leur forme, leur dessin, varient selon le rite, l’office et le degré. Il existe parfois aussi des différences selon les pays.

    Dans notre Ordre, il existe des symboles figurés, des symboles sonores et des symboles agis. Les bijoux font partie des symboles figurés.

    Jacob Tomaso émet l’hypothèse que les riches décorations, bijoux et ornements dont se paraient les gentilshommes, et tout particulièrement les militaires aux 17ème et 18ème siècles, sont probablement à la source du port des bijoux en Loge. De même les Loges militaires où l’on avait sous le regard les différents costumes et galons des grades, les colliers d’Ordre, les médailles et décorations ou encore les insignes de régiments, ont dû marquer la Maçonnerie de leurs pratiques, qu’on trouve également dans certains signes d’ordre [1].

    Le bijou de la Loge

    * Approche du symbolisme des bijoux maçonniques

    Au cours de la cérémonie d’Initiation au grade d’Apprenti, la coutume veut que le Vénérable Maître remettre à chaque Néophyte le bijou de la Loge et lui recommande de le porter à chaque Tenue, et tout spécialement lorsqu’il visitera d’autres Loges.

    Au moyen âge, le Maçon portait autour du cou, par une cordelette, un « jeton de présence », une sorte de disque percé au centre. Grâce à ce jeton de présence, le Maçon était autorisé à pénétrer et à travailler sur le chantier.

    Cette idée a sans doute survécu à travers la médaille portée par tous les Frères dans certaines Loges.

    * Approche du symbolisme des bijoux maçonniques

    La médaille de la Loge que nous portons généralement accrochée dans la poche de notre veston est le premier bijou dont nous avons fait connaissance le soir de notre Initiation, le seul que nous puissions porter en tant qu’Apprenti ou Compagnon.

    La présence du bijou de Loge semble remonter aux débuts de la Franc-maçonnerie moderne comme en témoigne un ouvrage de l’Abbé Perau publié en 1742 et intitulé « L’Ordre des Francs-maçons trahi et leur secret révélé ».

    Les médailles de Loge en reprennent parfois le nom, souvent le dessin distinctif. Les plus anciennes datent de la fin du 18ème siècle ; les plus récentes sont contemporaines. Simplement métalliques (argent ou métal argenté), puis, au 19ème siècle, parfois églomisées [2], les médailles de Loge sont souvent, de nos jours, émaillés.

    Très rapidement, dès l'apparition de la Franc-maçonnerie en France, nombre de Loges se sont dotées de représentations symboliques les représentant.

    * Approche du symbolisme des bijoux maçonniques

    De nos jours, nous dirions qu’elles ont toutes un « logo » que les Loges reproduisent sur leur courrier. On le retrouve aussi sur le sceau que le Frère Secrétaire appose sur les diplômes, sur les convocations. Ce « logo » est gravé sur la médaille portée durant les Tenues de Loge.

    D'un graphisme parfois recherché, parfois au symbolisme plus simple, ces médailles constituent un témoignage souvent émouvant de la vie des Loges et de leur histoire.

    Certaines médailles de loge sont parfois de véritables merveilles.

    * Approche du symbolisme des bijoux maçonniques

    D’autres bijoux

    L’ancienneté des bijoux apparaît dans les textes des anciens catéchismes écossais dès 1696. On y trouve une série de questions et réponses qui distinguent les bijoux en trois bijoux mobiles et trois bijoux immobiles. Ensuite l’usage des bijoux mobiles s’est étendu à toutes les autres fonctions d’officiers.

    A propos du nombre de bijoux, le Manuscrit Wilkinson  [3] (1727), nous indique ceci :

    • Avez-vous des bijoux immobiles dans votre loge ?
    • Nous en avons.
    • Combien ?
    • Quels sont-ils ?
    • Le pavé mosaïque, le parpaing et la pierre taillée.
    • Quel est leur premier usage ?
    • Le pavé mosaïque pour que le maître y trace ses plans, le parpaing pour que les compagnons de métier éprouvent leurs outils dessus et la pierre dégrossie pour que les apprentis entrés apprennent à travailler dessus.

    Dans les premières divulgations maçonniques [4], entre autre dans le Sceau Rompu datant de 1745, la pierre brute est considérée comme l’un des bijoux immobiles :

    • Quel est l’usage des bijoux immobiles ?
    • La Planche à tracer sert au Maître pour faire ses plans, la Pierre cubique à pointe aux Compagnons et la Pierre brute aux Apprentis [5].

    Remarquons que le Signe d’Ordre, que nous apprenons le soir de notre Initiation, est ternaire : il se fait par Équerre, Niveau et Perpendiculaire. Ils correspondent aux trois bijoux mobiles ou aux trois lumières de la Loge : le Vénérable, le Premier et le Second Surveillant.

    Pour la plupart des auteurs, les bijoux maçonniques sont au nombre de six. Trois sont fixes, trois sont mobiles. Pour Jean Ferré, auteur du Dictionnaire symbolique et pratique de la Franc-maçonnerie, les bijoux fixes sont :

    • La Pierre brute qui correspond au Premier degré et doit être posée en bas de l’autel, côté Nord. Remarquons qu’elle se trouve aussi souvent au pied du Tableau de Loge (avec le Maillet et le Ciseau), du côté Nord, effectivement.
    • La Pierre cubique qui correspond au Deuxième degré et doit être posée en bas de l’autel, côté Sud. Notons ici aussi que la Pierre cubique, souvent surmontée d’une pyramide, se trouve parfois au pied du Tableau de Loge, du côté Sud.
    • La Planche à tracer qui correspond au Troisième degré et doit être placée devant le Vénérable Maître. Remarquons que, dans la plupart de nos Loges travaillant au Rite moderne (belge), cette Planche à tracer est simplement peinte ou dessinée sur le Tableau de Loge.

    D’autres bijoux sont qualifiés de mobiles car, au contraire des précédents, ils ne sont attribués que provisoirement, pour la durée d’un mandat.

    Prenons provisoirement trois exemples :

    • L’Équerre est attribuée au Vénérable Maître ;
    • Le Niveau est l’emblème du Premier Surveillant ;
    • La Perpendiculaire est l’emblème du Second Surveillant.

    Au Rite Écossais Rectifié, ces trois bijoux ont la signification suivante :

    • l’Equerre est attribuée au Vénérable Maître comme emblème de la perfection des Travaux d’une Loge ;
    • le Niveau, attribut du Premier Surveillant, est l’emblème de la régularité des Travaux qu’effectuent les Frères dans le Temple qu’ils élèvent à la vertu ;
    • la Perpendiculaire, affectée au Second Surveillant qui doit veiller à ce que tous les Frères respectent fidèlement les lois et préceptes de l’Ordre, est l’emblème de la solidité des ouvrages maçonniques.

    Ces éléments sont appelés bijoux parce qu’ils représentent ce que la Maçonnerie a de très précieux et qu’elle est la seule société initiatique à les utiliser. Ils sont le symbole de la transformation qui s’opère de l’Apprenti au Compagnon, puis du Compagnon au Maître, en même temps que des moyens mis en œuvre pour que l’alchimie puisse se faire.

    Supprimer la Pierre brute, la Pierre cubique, la Planche à tracer, faire disparaître l’Equerre, le Niveau et la Perpendiculaire, ce serait enlever à la Maçonnerie toute son essence, toute son existence. Rappelons que la Franc-maçonnerie est le seul mouvement initiatique qui ait choisi la construction d’un édifice pour bâtir tout un enseignement ésotérique.

    Utilité des décors maçonniques

    L’utilité des décors maçonniques dépend très étroitement de la façon dont la Loge et les Frères Maîtres perçoivent les offices ou charges. Bien souvent, malheureusement, les offices sont considérés comme une exaltation individuelle. Le Frère, après un parcours souvent très rapide aux grades précédents, atteint la Maîtrise. Il sort de l’anonymat des Frères et pourrait se croire investi d’un pouvoir d’autorité sur ses Frères.

    Essayons cependant de considérer les décors et en particulier les bijoux maçonniques sous l’angle de l’office perçu comme une fonction de création. Cela signifie qu’il est vital de prendre conscience que ces décors qui complètent l’habit maçonnique n’ont pas pour but de faire « valoir » celui qui les porte. Leur rôle est de marquer la fonction de celui qui reçoit la charge d’un office.

    Précisons encore que les décors maçonniques rassemblent au moins trois catégories : les baudriers, les colliers et les cordons. Ces derniers se subdivisent en écharpes et sautoirs. Des précisions sont nécessaires ! Il arrive que le baudrier soit plus communément appelé cordon ; il rejoint alors l’écharpe. Les colliers, selon la manière dont ils sont nommés et portés, peuvent rejoindre les cordons ou les sautoirs.

    Baudrier ou écharpe

    Le terme baudrier semble venir de l’ancien français « baldrei » ou « baudré » qui signifie « large bande de cuir supportant l’épée », ou du latin « balteus », qui signifie bande.

    Son intrusion en Maçonnerie est fortement liée à celle des aristocrates dans les loges avec leurs gentilshommes portant l’épée au côté. Il établissait une sorte d’égalité entre tous les membres de la Loge, permettant aux roturiers de porter l’épée comme les nobles, devenant un emblème d’égalité.

    En effet, nous dit Gilbert Alban, le baudrier est une réminiscence de la Maçonnerie du 18ème siècle, époque durant laquelle tous les membres de la Loge portaient l’épée du côté gauche, par souci d’égalité fraternelle, que ces membres fussent nobles ou roturiers. Il ne reste aujourd’hui de cette épée que la rosette au bas du baudrier, là où se trouvait l’ouverture du fourreau.

    Dans certaines Loges, notamment celles qui travaillent au Rite français, il est coutume, pour les Maîtres Maçons, de porter un baudrier. Celui-ci correspond vraisemblablement à une survivance d’un accessoire vestimentaire indispensable au temps où l’on portait l’épée et destiné à la soutenir.

    Au Rite Écossais Rectifié, le port de l’épée est encore en vigueur, tout comme celui du fourreau.

    Dans les autres rites, pour conserver ces notions d’égalité et d’armes, la Franc-maçonnerie a mis, à la place de l’épée, les « armes » du Maçon : l’Equerre et le Compas entrelacés. La bande de cuir s’est vue remplacée par une bande d’étoffe et l’on est passé du vocable baudrier à celui d’écharpe.

    Mais quelle est symbolique peut-on accorder au baudrier – écharpe ?

    Lucien Brélivet a avancé comme explication l’imitation de certains ordres comme celui de la jarretière fondé en 1348 par Edouard III d’Angleterre ou celui de la Chevalerie.

    L’intérêt du baudrier pourrait être de marquer sur le corps une diagonale. La plus intéressante est celle qui passe sur le cœur. Cette diagonale rappellerait la dynamique vitale que les Compagnons doivent s’employer à découvrir et à savoir utiliser pour mettre en forme ce qui est transmis par la Tradition.

    En ce cas, il serait plus juste d’utiliser le mot écharpe, d’autant que son étymologie rappelle le voyage. Echarpe vient du francisque skirpa « panier de jonc », lui-même du latin scirpus « jonc », et scrippa « sacoche de pèlerin ». Il s’agissait d’une sorte de sacoche portée en bandoulière où l’homme sur le chemin plaçait ses richesses spirituelles et matérielles. Cette démarche correspond bien au voyage du Compagnon caractéristique du grade.

    Sautoir ou collier

    Les Officiers Dignitaires portent un bijou qui pend à l’extrémité du sautoir de leur charge ou fonction.

    Le sautoir est à ranger au nombre des « décors » dans l’univers de la Franc-maçonnerie. Le sautoir est en général le signe vestimentaire d’un office (charge ou fonction). C’est une sorte de large ruban que les Officiers Dignitaires portent autour du cou pendant les Tenues.

    Les couleurs des sautoirs varient selon le Rite pratiqué ; ils peuvent aussi varier selon la valeur symbolique accordée à chacun d’eux et selon la fonction de celui qui le porte.

    A l’origine, le sautoir ou cordon (ou collier à certains rites de la G.L.N.F.) n’avait qu’un but, celui de suspendre les bijoux et distinguer ainsi les officiers. Ils ne possédaient aucun sens symbolique.

    Ajusté sur les épaules, il descend en pointe jusqu'à l’épigastre et s’orne du bijou distinctif de l’office en question. A son extrémité pend en effet un bijou qualifié de « mobile » parce que le sautoir peut passer d’un Frère à l’autre selon la fonction ou charge qui lui est dévolue, généralement pendant une année.

    Les sautoirs ou cordons, les bijoux avec les gants et le tablier constituent les décors individuels du Maçon. Ils ne sont pas des décorations honorifiques mais des repères visuels des fonctions occupées.

    Tout sautoir symbolise les responsabilités maçonniques de ceux qui les portent, ainsi que leur autorité quand il s’agit de dignitaires de l’Ordre (Grands Officiers), le Grand Maître, par exemple.

    Le terme plus général de collier permet de mieux percevoir la fonction intrinsèque de cet objet dans les sociétés traditionnelles, et donc l’intérêt de son emploi dans une Loge maçonnique.

    Aujourd’hui, le collier est un accessoire et un agent essentiel du « paraître » social. Mais dans les civilisations anciennes, il n’en allait pas de même. Chez celles-ci, le collier fait paraître ce que l’on est. Ce que l’on montre sur son corps, ce n’est pas la valorisation de l’individu, mais une fonction à remplir, et bien indigne de cette fonction serait celui qui chercherait à s’en glorifier à titre individuel. Or, la plupart des Francs-maçons portent toutes sortes de colliers nommés cordons et pratiquent souvent l’inverse ! Cette attitude débouche sur l’obstacle fatal pour le Frère : la vanité. C’est peut-être la raison pour laquelle, le terme charge est plutôt préféré à celui de fonction.

    Dans une Loge en recherche d’Initiation, les colliers sont mis en relation avec une fonction créatrice. Le collier est le canal d’une énergie particulière émanant de l’unité formée de l’ensemble des offices.

    Ce qui est important avec le sautoir, c’est que l’on dote l’être d’une nuque, d’un cœur et d’un ventre. Le sautoir délimite les différents niveaux de l’être. Il protège la  nuque, lieu de puissance, en montrant qu’il faut avoir une tête pour avoir un cœur. Il symbolise aussi la présence de la fonction qui vient se fixer sur le Frère.

    Le bijou des Officiers Dignitaires

    En métal argenté ou doré, selon les rites, et de formes diverses, ces bijoux représentent des symboles attachés à l'Office tenu : Équerre pour le Vénérable, Corne d'abondance pour le Maître des Banquets, Livre pour l'Orateur, Plumes croisées pour le Secrétaire,... Les anciens Vénérables, pour leur part, portent comme bijou la résolution du théorème de Pythagore accrochée sous une Équerre.

    C’est grâce à cet emblème que chaque Frère peut reconnaître la fonction d’un Officier Dignitaire lorsque celui-ci ne se trouve pas encore à sa place ou derrière son « plateau ».

    Un sautoir, muni d’un symbole de la fonction, est attribué à chacun des Officiers Dignitaires de la Loge, sauf l’Architecte. Mais cette charge est souvent cumulée avec celle de Maître des cérémonies.

    Voici tout d’abord un tableau synthétique qui nous permettra d’avoir une vue d’ensemble des bijoux des Officiers Dignitaires :

     

    Charge

    Symbole

    Représentation

    Vénérable Maître

    Équerre

     * Approche du symbolisme des bijoux maçonniques

    Premier Surveillant

    Niveau

     * Approche du symbolisme des bijoux maçonniques

    Second Surveillant

    Perpendiculaire

     * Approche du symbolisme des bijoux maçonniques

    Orateur

    Livre ouvert sur triangle et soleil rayonnant

    + le mot « Loi »

     * Approche du symbolisme des bijoux maçonniques

    Secrétaire

    Deux plumes croisées

    et nouées

     * Approche du symbolisme des bijoux maçonniques

    Trésorier

    Une clé

    ou

    deux clés croisées

     * Approche du symbolisme des bijoux maçonniques

    Aumônier Hospitalier

    Une bourse

     * Approche du symbolisme des bijoux maçonniques

    Expert

    Deux glaives croisés

    ou

    Glaive et Règle croisés + œil

     * Approche du symbolisme des bijoux maçonniques

    Couvreur

    Un glaive

     * Approche du symbolisme des bijoux maçonniques

    Maître des Cérémonies

    Deux cannes croisées

     * Approche du symbolisme des bijoux maçonniques

    Maître des Banquets

    Une corne d’abondance

     * Approche du symbolisme des bijoux maçonniques

    Maître de la Colonne d’Harmonie

    Une lyre

     * Approche du symbolisme des bijoux maçonniques

     

    Approche du symbolisme des bijoux des Officiers Dignitaires

    N.B. : pour chaque fonction, consultez les illustrations reprises ci-dessus !

    Le bijou du Second Surveillant

    Commençons par examiner le bijou de l’Officier qui est le plus proche de nous, celui qui est chargé de notre formation d’Apprenti : le Second Surveillant.

    Le Second Surveillant porte en sautoir un bijou représentant la Perpendiculaire ou le Fil à plomb, symbole actif de la recherche en soi dans les profondeurs du silence, de l’équilibre et de la voie droite.

    Le Frère Second Surveillant remplit une fonction d’accueil et d’ouverture comme d’éducation pour les Apprentis. Il est chargé de leur éveil.

    Sa fonction d’éveilleur et d’instructeur est fondamentale. C’est lui qui va former les nouveaux maillons qui vont assurer la perpétuation et la relève de la Loge dans l’esprit qui la caractérise.

    Cette fonction symbolise la beauté qui orne et harmonise tous les aspects de l’édifice par l’amour.

    Symbolisme du bijou :

    La Perpendiculaire peut notamment symboliser la profondeur dans l'observation. Elle est aussi l'emblème de la recherche profonde de la Vérité, de l'Aplomb et de l'Équilibre. Le Fil à plomb guide l’esprit vers son axe intérieur. La Perpendiculaire pourrait marquer la verticale pour indiquer que le niveau spirituel de la Loge doit sans cesse être élevé et maintenu par les soins de celui qui remplit cette fonction.

    Le bijou du Premier Surveillant

    Lorsque notre formation d’Apprenti devient suffisante sans pour autant être terminée (ne sommes-nous pas d’éternels Apprentis ?), nous passons sous l’autorité bienveillante du Premier Surveillant.

    Le Premier Surveillant porte en sautoir le Niveau qui ne peut être horizontal que si la Perpendiculaire est en équilibre. C’est la recherche du juste milieu qui ouvre l’accès à la Chambre du Milieu et à l’Unité. Le niveau est l'emblème de l'égalité.

    Symbolisme du bijou :

    Le bijou du Premier Surveillant se trouve sous le signe conjoint de la Perpendiculaire et de l’Equerre. Cette conjonction donne naissance à un troisième symbole, le Niveau dans lequel est inclus le Delta grâce à sa base.

    Le Niveau est généralement représenté par un triangle au sommet duquel est fixé un fil à plomb ou perpendiculaire. Le Niveau est considéré comme le symbole de l’égalité sociale mais en aucune façon il ne saurait représenter le nivellement des valeurs. En outre, le Niveau est nécessaire avec la Perpendiculaire et l’Equerre à l’édification correcte d’un ouvrage. Il est indispensable pour contribuer à l’idéal de perfection du Maçon.

    Par cette constatation on peut penser que l’Apprenti, par introspection, est invité à répondre à la question « qui suis-je ? », alors que le Compagnon, à l’aide du Niveau, se trouve amené à se demander « où suis-je ? » et « où vais-je ? ».

    Le bijou du Secrétaire

    La charge de Secrétaire revêt une grande importance du fait de la multiplicité de ses fonctions. Au plan purement maçonnique, on dit qu’il est la mémoire de la Loge. Il a pour fonction essentielle de rendre compte des Travaux maçonniques.

    Comme signe distinctif de sa charge, le Frère Secrétaire porte un sautoir orné de deux plumes entrecroisées.

    Symbolisme du bijou :

    Le sens de ces deux plumes croisées est assez évident : c’est le symbole de l’écriture. Ces deux plumes entrecroisées n’ont rien d’original, rien d’ésotérique.

    Mais puisqu’au Rite Écossais Ancien Accepté, la Lune est attribuée à cet officier, pourquoi son sautoir n’est-il pas orné de ce symbole ?

    Le Secrétaire, possesseur du « Livre d’Architecture », symbole-type du Temple en cours de construction, pourrait être considéré comme le Frère qui édifie la Loge au fil du temps, esquissant une nouvelle « pièce », élevant un nouvel « étage » à chaque Tenue sous l’aspect de la « Planche tracée des derniers Travaux ».

    Le bijou de l'Orateur

    L’Officier qui, le soir de notre Initiation, fut chargé de nous souhaiter la bienvenue au nom de la Loge et de présenter une planche de première instruction, c’est le Frère Orateur. Sa fonction consiste en cette occasion, comme lors des cérémonies de Passage au grade de Compagnon ou d’Elévation à la Maîtrise, à éclairer et enseigner, en s’adaptant au niveau de son interlocuteur.

    A chacune de ses interventions, il s’agit de donner au nouveau promu, en quelques traits, des pistes de travail et de tirer la quintessence de ce qui vient de lui être transmis.

    Gardien de la Loi maçonnique, l’Orateur porte en sautoir un bijou représentant un livre ouvert, celui de la Loi, avec, à l’arrière-plan, un soleil rayonnant.

    Symbolisme du bijou :

    Le bijou de l’Orateur figure un livre ouvert ou un parchemin à demi déroulé car cet officier est tout simplement le gardien de la Loi maçonnique.

    Le bijou du Couvreur

    La Couverture de la Loge est probablement l’un des offices les plus anciens car dans les premières Loges, le Couvreur armé d’une épée servait réellement de gardien du seuil.

    Pour emblème de sa mission qui concerne tout ce qui a trait à la garde des abords, extérieur et intérieur, de la porte, le Frère Couvreur porte un sautoir orné d’un glaive vertical dont la pointe – qui devrait normalement être dirigée vers le ciel – marque sa fermeté dans la protection de l’enceinte sacrée que constitue la Loge.

    Symbolisme du bijou :

    Le bijou du Couvreur reproduit l’Épée dont il est muni en Tenue. L’arme de cet officier défend la Loge contre les profanes ou les exclus de l’Ordre qui voudraient pénétrer dans le temple. En fait, ce symbole protège l’Initié en Tenue contre ce qui pourrait le distraire des activités maçonniques.

    Le bijou de l'Expert

    Chargé du contrôle de l’appartenance à une Obédience Régulière de la Franc-maçonnerie de toute personne se présentant dans les locaux de la Loge, chargé de la plupart des « tuilages », du contrôle des scrutins, de la vêture correcte des Frères, de la surveillance de la bonne exécution des rituels et de la décoration du Cabinet de Réflexion, le Frère Expert est muni d’un sautoir décoré de deux glaives croisés.

    Il existe des variantes : ces glaives croisés surmontent parfois un œil. Il représente aussi parfois une colombe d’argent tenant un rameau d’olivier dans son bec.

    Symbolisme du bijou :

    Ce bijou engendre un puissant symbolisme. Le Glaive et la Colombe sont des signes, l’un des combats pour établir la paix intérieure, l’autre de paix instituée à la suite de ces combats. Et les deux sont signes de Lumière.

    Il en va de même pour l’œil qui rappelle que l’Expert est l’officier chargé d’avoir, avant, pendant et après la tenue, l’œil à tout en matière d’ameublement symbolique du temple, de bonne exécution des rituels, etc.

    Le bijou de l'Hospitalier ou Eléémosynaire 

    Appelé « Eléémosynaire » au Rite Écossais Rectifié, le Frère Aumônier Hospitalier siège à côté du Frère Expert. Il a la responsabilité des devoirs de charité et de philanthropie de la Loge. Il s’enquiert des besoins et détresses des Frères et des membres de leurs familles, et de concert avec le Vénérable Maître et le Frère Trésorier, distribue les aumônes de la Loge. Le bijou qui orne son sautoir est une bourse aumônière. Mais Jean Ferré fait remarquer que ce bijou peut aussi être une Truelle.

    Symbolisme de la Bourse :

    La bourse aumônière marque bien la responsabilité de celui qui exerce toutes les œuvres d’assistance de l’Atelier. Ce bijou traduit bien la fonction de cet officier : une bourse rouge ou dorée, en forme de cœur. Le cœur symbolise l’amour, la générosité, le dévouement. Le Frère Hospitalier est chargé de recueillir les oboles dans ce qu’il est de coutume d’appeler le Tronc de Bienfaisance, de la Veuve ou de Solidarité.

    Le bijou du Trésorier

    Le sautoir du Frère Trésorier, responsable de la gestion des fonds de la Loge, est orné d’une clef, parfois de deux clefs croisées qui lui donnent le pouvoir de lier et de délier, d’ouvrir et de fermer le trésor de l’Atelier.

    Ce symbole axial de la clé représente aussi un « sésame, ouvre-toi » nous dit Irène Mainguy.

    Symbolisme du bijou :

    Les deux clés croisées traduisent bien le symbolisme des fonctions du Trésorier qu’il doit assumer avec rigueur et droiture. Il garde le Trésor de la Loge, caché dans un coffre, et que seules ses clés peuvent ouvrir, ceci au sens symbolique.

    Le trésor de la Loge n’existe effectivement que sous forme de livres comptables ! Son symbolisme vrai est bien différent car le trésor en question n’a rien de matériel : c’est le thesaurus maçonnique. La clé symbolise toujours l’ouverture et la fermeture des portes intérieures de l’Initié. Elle délie et lie tour à tour des états de conscience, ouvre des états plus purs, plus riches, plus lumineux, et ferme des états anciens, pauvres, dépassés, en voie de dissolution.

    En maçonnerie, les Clés donnent accès aux Portes de ses degrés initiatiques.

    Le bijou du Maître des Cérémonies

    Le sautoir du Frère Maître des Cérémonies est orné d’un bijou composé de deux cannes croisées et liées par un ruban.

    Symbolisme du bijou :

    Les deux cannes entrecroisées et liées par un ruban reproduisent le symbole mythique de la Canne dont cet officier ne se départit jamais quand il se déplace dans le temple.

     

    Le bijou du Maître de la Colonne d'harmonie

    Le Frère Maître de la Colonne d’Harmonie s’occupe de l’accompagnement musical de toutes les Tenues. Il veille à donner une illustration musicale appropriée et à régler les divers éclairages du Temple. Son sautoir est muni d’un bijou en forme de lyre.

    Symbolisme du bijou :

    La lyre, inventée par Hermès ou par l’une des neuf Muses, Polymnie, est l’instrument de musique d’Apollon et d’Orphée, aux accents prestigieux, et le symbole des poètes. Plus généralement, elle est le symbole et l’instrument de l’harmonie cosmique : au son de la lyre, Amphion bâtit les murs de Thèbes.

    Dans l’iconographie chrétienne, elle évoque la participation active à l’union béatifique. Ce rôle est celui de la harpe de David. Les sept cordes de la lyre correspondraient aux sept planètes : elles s’accordent dans leurs vibrations, comme celles-ci dans leurs révolutions cosmiques ; quand le nombre des cordes fut élevé à douze, on voulut y voir une correspondance avec les douze signes du Zodiaque.

    Le bijou du Maître des Banquets

    Le Frère Maître des Banquets organise les Travaux de Table. Son sautoir est muni d’un bijou en forme de corne d’abondance.

     Symbolisme du bijou :

    Selon la tradition la plus populaire, la corne d'abondance ornait le front de la chèvre qui nourrit Zeus dans son enfance. La mythologie grecque raconte qu’à sa naissance, la mère de Zeus confia son enfant à la chèvre Amalthée.

    Elle craignait en effet que le bébé ne soit mangé par Cronos, son père. Un jour, Zeus cassa une des cornes de sa nourrice. Plus tard, pour se faire pardonner, il donna à cette corne le pouvoir d’abonder de fleurs et de fruits. Cette corne d’abondance représente la richesse et la fécondité.

    Dans l'iconographie païenne, elle est le symbole de la richesse, de la prospérité, de la générosité et de l'abondance.

    Le bijou du Vénérable Maître

    Le Vénérable Maître, autorité et chef de la Loge, il la dirige avec l’aide des Frères Surveillants, préside tous les Travaux et exécute avec eux tous les rituels. Le bijou suspendu à son sautoir est une Équerre.

    Symbolisme du bijou :

    Dire que  tout est d’équerre signifie que tout est en règle. C’est en effet la mission du Vénérable Maître qui doit posséder une connaissance suffisante des principes maçonniques et se doit de rechercher la vérité et la cohésion du groupe qu’il dirige : sans équerre, point de construction harmonieuse !

    L’Équerre du Vénérable Maître, dont les branches sont dans le rapport pythagoricien 3 à 4, représente à la fois la rectitude morale de celui qui la porte et sa qualité de Première Lumière de l’Atelier. Elle est dorée, couleur du soleil, ce qui se passe de commentaire.

    L’Équerre du Vénérable Maître est l’étoile secrète mais aussi une des portes du temple : la porte de l’Orient qui révèle le lieu de l’origine de la Lumière.

    Le bijou du Passé Maître Immédiat

    Le Passé Maître Immédiat, parfois aussi appelé Vénérable Maître d’honneur, est le Vénérable Maître qui vient de descendre de charge. Il assiste, aide et conseille le Vénérable Maître actuel et est seul habilité à le remplacer au cas où ce dernier serait absent.

    Symbolisme du bijou :

    Dorée elle aussi, l’Equerre du Passé Maître Immédiat est complétée par le tracé géométrique du théorème de Pythagore, signe de grande avancée sur la voie initiatique.

    Approche du symbolisme d'autres bijoux

    Symbolisme de la Truelle

    Au moyen âge, les imageries populaires et religieuses représentaient souvent Dieu une Truelle à la main. Cet outil était perçu comme symbole de la puissance créatrice, mais aussi de la volonté et du pouvoir d’unir. Dieu est Création et Union.

    La truelle scelle et favorise la fusion des pierres entre elles et les réunit ; c’est pourquoi elle est symbole d’unité, outil par lequel l’œuvre du constructeur s’achève et devient parfaite. C’est probablement ce qui a fait dire à Daniel Ligou qu’elle est symbole de l’amour fraternel qui unit tous les Maçons, ciment essentiel, utilisé pour l’édification du temple idéal.

    La truelle est reconnue tout particulièrement comme emblème des qualités essentielles du véritable Maçon : tolérance et bienveillance.  Elle est aussi perçue par eux comme pouvant symboliser la conscience de la fraternité universelle entre tous les êtres humains, comme l’excellence du travail bien fait par la solidarité entre tous.

    Symbolisme du Compas

    A titre indicatif, précisons encore que le bijou du Très Respectable Grand Maître, à la tête de notre Obédience, est formé d’un Compas ouvert à 45 degrés.

    Symbolisme du bijou :

    Associé aux mathématiques, à l'astronomie, à l'architecture et à la géographie, le Compas représente les sciences exactes et la rigueur mathématique.

    Il sert aussi à dessiner le cercle et symbolise ainsi le dynamisme constructeur et le cycle de l'existence car il tourne pour revenir à son point de départ.

    Dans l'iconographie traditionnelle, le Compas est symbole de la prudence, la justice, la tempérance et la véracité, qui sont des vertus fondées sur l'esprit de mesure.

    Instrument de mesure et de rapports, le Compas est aussi devenu l'emblème de la géométrie, de l'astronomie, de la muse Uranie (qui personnifie l'astronomie), de l'architecture et de la géographie.

    Le Compas est l’image de la pensée dans les différents cercles qu’elle parcourt.

    L’écartement de ses branches pourrait figurer les divers modes de raisonnements, qui peuvent être larges, précis mais toujours clairs. Il peut également symboliser l’ouverture de l’esprit, la compréhension et l’étendue de la connaissance.

    Les degrés d'ouverture du Compas symbolisent, dans la Tradition maçonnique, les degrés de la connaissance. Il représente aussi, de façon générale, la mesure, la prudence, la justice, la tempérance et la véracité.

    Si on considère que l’écartement du Compas correspond au niveau de connaissance, il est intéressant de constater que les Francs-maçons limitent son ouverture à 90°. Ceci indique clairement la volonté d’affirmer les limites de l'homme !

     

    Pourquoi certains Frères portent-ils parfois plus qu’un bijou ?

    Il n’est pas rare d’observer que certains Frères portent plus d’un bijou de Loge. C’est tout simplement parce qu’ils ont fait le choix d’être membre de plus d’une Loge.

    Dans notre Obédience, l’usage veut qu’un Frère ne porte, en Loge « bleue » (Apprentis, Compagnons, Maîtres), que les bijoux des Loges dont il est membre. Un Frère ne peut donc pas porter les bijoux des autres corps maçonniques dont il fait éventuellement partie (Loge de Marque, Royal Arch, etc.).

     

    R :. F :. A. B.

    [1] Tomaso Jacob, Dictionnaire thématique illustré de la Franc-maçonnerie, Editions Morena, 1993.

    [2] En verrerie, églomiser, c’est fixer une mince feuille d’or ou d’argent sous le verre, avant que le dessin soit ensuite exécuté à la pointe sèche et maintenu par une deuxième couche ou une plaque de verre.

    [3] Cf. travaux de la Loge Nationale de Recherches Villard de Honnecourt N° 9, le manuscrit Wilkinson, pp. 162 – 168

    [4] Désaguliers René, Les Pierres de la Franc-maçonnerie, pp. 95 – 114, Editions Dervy, 1995

    [5] Remarquons que dans ces anciens écrits, l’usage de la majuscule aux symboles n’était pas encore de mise.

     

    Bibliographie

    Alban GilbertGuide de l’Apprenti

    Editions Detrad, Paris, 1996

     

    Baudouin BernardDictionnaire de la Franc-maçonnerie

    Editions De Vecchi, Paris, 1995

     

    Boucher JulesLa symbolique maçonnique

    Editions Dervy, Paris, 1995

     

    Brelivet LucienLes habits des Francs-maçons

    Gants, tabliers et autres vêtements

    La Maison de Vie, Fuveau, 2008

     

    Darche ClaudeVade-mecum de l’Apprenti

    Editions Dervy, Paris, 2006

     

    Ferré JeanDictionnaire symbolique et pratique de la Franc-maçonnerie

    Editions Dervy, Paris, 1994

     

    Guigue Christian La formation maçonnique

    Editions Guigue, Mons-en-Barœul, 1995

     

    Ligou Daniel Dictionnaire de la Franc-maçonnerie

    Editions du Puf, 1987

     

    Mainguy IrèneLa symbolique maçonnique du troisième millénaire

    Editions Dervy, Paris, 2001

     

    Michaud DidierL’Equerre et le chemin de rectitude

    La Maison de Vie, Fuveau, 2002

     


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  •  Le Frère Secrétaire 

    Définition du Secrétaire

    C’est le tuilage de l’Apprenti qui va nous conduire directement à la définition du Secrétaire de la Loge. En effet, si Trois Maçons dirigent la Loge, cinq l’éclairent : ce sont le Vénérable Maître, les deux Surveillants, l’Orateur et le Secrétaire. Dans la hiérarchie maçonnique, le Secrétaire est donc le cinquième Officier, la cinquième « Lumière » au sein d’une loge.

    Comment le reconnaître ?

    Dans le hall d’entrée de la Loge, parfois dans le bar ou dans la salle humide, c’est bien souvent lui qui insistera pour que vous signiez le registre de présences !

    Mais, en Tenue, dans la Loge elle-même ?

    Ss place

    Généralement, selon le Rite pratiqué, le Secrétaire d’une loge siège à l’Orient, à la droite du Vénérable Maître (au Rite Moderne, au Rite Français Moderne, au Rite Écossais Philosophique et au Rite Écossais Rectifié, en haut de la colonne du Nord) ou à la gauche du Vénérable (au Rite Écossais Ancien Accepté, en haut de la colonne du Midi), symétriquement par rapport face à l’Orateur.

    Mais s’il n’est pas encore assis à sa place, derrière son « plateau », à sa « stalle » pour reprendre ce néologisme belge ?

    Son sautoir

    Comme signe distinctif de sa charge, le Secrétaire porte un sautoir orné de deux plumes entrecroisées. Qu’est-ce à dire ?

    Le sautoir est à ranger au nombre des « décors » dans l’univers de la Franc-maçonnerie. C’est une sorte de large ruban que les Officiers Dignitaires portent autour du cou pendant les Tenues. A son extrémité pend un bijou qualifié de « mobile » parce que le sautoir peut passer d’un Frère à l’autre selon la fonction qui lui est dévolue.

    Il en existe deux types distincts :

    • les sautoirs des Officiers Dignitaires d’un Atelier ou de la Grande Loge ;
    • les sautoirs des grades supérieurs (Loges dites « de Perfection » ou « Hauts Grades »).

    Les couleurs des sautoirs varient :

    • selon le Rite pratiqué,
    • selon la valeur symbolique accordée à chacun d’eux,
    • selon la fonction de celui qui le porte.

    Ils sont généralement ornés de bijoux (Équerre, Perpendiculaire, Niveau, deux clefs croisées, deux plumes entrecroisées, bourse, deux glaives entrecroisés, Règle et Glaive entrecroisés, etc…) ( Se référer à la planche "Approche du symbolisme des bijoux maçonniques")

    C’est donc grâce à cet emblème que vous pouvez reconnaître la fonction d’un Officier Dignitaire lorsque celui-ci ne se trouve pas encore à sa place, derrière son « plateau ». En ce qui concerne le Frère Secrétaire, son sautoir est donc orné d’un bijou représentant deux plumes entrecroisées.

    Ses fonctions

    La charge de Secrétaire revêt une grande importance du fait de la multiplicité de ses fonctions. Au plan purement maçonnique, on dit qu’il est la mémoire de la Loge.

    Il a pour fonction essentielle de rendre compte des Travaux maçonniques.

    Pour ce faire, durant les Tenues, il observe les faits essentiels qui se passent, prend des notes, écoute les communications et les échanges verbaux lorsque les Frères ont obtenu la parole, résume et transcrit les propos issus des planches présentées.

    Grâce au registre des présences, signé avant toute Tenue tant par les Frères de l’Atelier que par les Frères Visiteurs, il note le nombre de Frères présents et les excuses des Frères absents.

    A partir de cette esquisse il rédige ensuite le procès-verbal de la réunion que l’on nomme « planche tracée » ou « Tracé de la Tenue » et qui sera lue aux membres de l’Atelier lors de la Tenue suivante.

    Remarquons que lors de la Tenue suivante, ce procès-verbal, ce « Tracé de la tenue précédente » peut faire l’objet de petites corrections à la demande des membres de l’Atelier puis, éventuellement, d’un commentaire de la part de l’Orateur. Après quoi il doit être adopté par les Maîtres qui y étaient présents, signé par le Secrétaire, par le Vénérable et parfois par l’Orateur. Ce tracé rejoint enfin les autres documents de ce type dans le « Livre d’Architecture ».

    C’est le Secrétaire qui, avec le Vénérable Maître, prépare les convocations reprenant l’ordre du jour des Travaux de la Tenue suivante. Il les envoie à chacun des membres de l’Atelier ainsi qu’aux instances supérieures.

    Ses autres fonctions

    Le Secrétaire s’acquitte également d’autres fonctions :

    • il tient en ordre le registre matricule des membres de la Loge, par ordre d’admission ;
    • il s’occupe de la correspondance en général ;
    • il enregistre les votes ;
    • il gère tous les actes administratifs et relationnels entre la Loge et ses membres, entre la Loge et l’Obédience (le Grand Comité) mais aussi entre la Loge et les Loges des autres régions.

    C’est ainsi qu’après l’approbation du Tracé de la Tenue précédente, le Secrétaire est souvent amené à lire le Bulletin d’Information de la G.L.R.B. ainsi que l’une ou l’autre communication particulière telles des invitations émanant d’autres loges. 

    Des votes

    Le Secrétaire enregistre toutes les décisions prises par les Frères Maîtres de l’Atelier. Ainsi, lorsqu’un vote intervient (vote en faveur d’une augmentation de salaire, élection d’un nouveau Vénérable Maître,…), après le dépouillement du scrutin (décompte des boules blanches et noires), le Secrétaire note le résultat. Parfois il est amené à compter les voix favorables et défavorables exprimées par les mains levées.

    Le Secrétaire doit établir les dossiers de candidature, préparer les dossiers d’augmentation de salaire, signaler à l’administration maçonnique de l'Obédience (Le Grand Secrétariat) les différents changements qui peuvent s’opérer au sein de la Loge : Initiations, Passages au 2ème degré, Élévations au 3ème degré, démissions, radiations, affiliations, décès … afin que le fichier de l’Obédience soit également tenu à jour.

    Des convocations

    C’est "par mandement du Vénérable Maître" que le Secrétaire rédige, imprime, photocopie et expédie les convocations. Celles-ci doivent mentionner la date et l’heure de la prochaine Tenue. Le lieu où se tient la Tenue est généralement toujours le même mais il arrive que deux ou trois Loges se réunissent simultanément et tiennent ensemble une Tenue commune. Chaque convocation mentionne également l’ordre du jour des travaux.

    L’ordre du jour des Travaux

    Chaque Tenue commence toujours par l’Ouverture des Travaux, en principe au premier degré, le degré d’Apprenti.

    Ensuite il y a lieu de prévoir, comme il se doit, un moment d’accueil par le Vénérable Maître : l’accueil de toute Autorité maçonnique (par exemple un délégué du Grand Maître ou un représentant du Grand Comité) mais aussi de tous les Frères Visiteurs en provenance d’autres Loges de notre Obédience ou d’Obédiences étrangères reconnues par la G.L.R.B.

    Puis l’ordre du jour des Travaux peut appeler la lecture d’une planche par un Frère Maître de l’Atelier ou d’une autre Loge, la lecture de planches d’enquête à propos d’un candidat à l’Initiation, la lecture d’une planche d’augmentation de salaire par un Frère Apprenti ou Compagnon.

    Les Travaux du jour peuvent également consister en une cérémonie d’Initiation d’un Profane, en une cérémonie de Passage d’un Frère Apprenti au grade de Compagnon, en une cérémonie d’Elévation d’un Frère Compagnon au Sublime Grade de Maître. Une fois par an la Loge fête le Solstice d’hiver et le Solstice d’été. Une fois par an ou tous les deux ou trois ans, selon les loges, on procède à l’installation du nouveau Vénérable Maître élu (dont une partie est ésotérique).

    Occasionnellement interviennent des scrutins (en faveur de la poursuite d’une procédure d’admission, en faveur d’une affiliation ou d’une augmentation de salaire ; l’élection d’un nouveau Vénérable Maître ; l’adoption de modifications du Règlement particulier de la Loge).

    L’ordre du jour prévoit toujours la Fermeture des Travaux, généralement au premier degré. Chaque Tenue se termine le plus souvent par des agapes fraternelles en salle humide ou par un vin d’honneur.

    Les travaux de la Commission des Officiers Dignitaires

    Le Secrétaire participe également aux travaux de la Commission des Officiers Dignitaires de sa Loge, la « C.O.D. ».

    C’est lui qui, par mandement et avec l’aide du Vénérable Maître, convoque les membres de ladite commission, établit l’ordre du jour de chaque réunion et rédige le compte-rendu qui sera lu et approuvé lors de la prochaine réunion.

    Lors de la Tenue administrative annuelle

    Enfin, lors de la Tenue administrative, il est de tradition de lire le rapport administratif de l’année écoulée. C’est également une tâche ô combien agréable qui revient au Frère Secrétaire.

    Pour conclure provisoirement

    Comme vous pouvez le constater, la tâche est lourde mais il convient de l’entreprendre avec cœur et courage. Elle peut contribuer à la Construction du Temple, notre objectif à tous. Elle peut rendre les ouvriers contents, satisfaits et heureux de participer à nos Travaux à la gloire du G.A.D.L.U. ainsi qu’à faire prospérer l'Atelier.  

    Post-scriptum

    La présente planche, je l'avais tracée lorsque j'étais "jeune Maître". Elle devait me permettre de mieux percevoir la fonction de Secrétaire d’une Loge, du moins telle que je la voyais au moment où les Frères de deux Loges m’avaient pressenti pour l’exercer simultanément !

    C’est donc une vue toute personnelle et provisoire de la fonction, basée sur une perception toute intuitive, sur des observations fines effectuées au cours de mes nombreuses visites ainsi que sur quelques lectures dont vous trouverez les références ci-dessous dans la bibliographie finale de ce travail.

    Aujourd'hui, pour plus de précisions quant à cette lourde charge, il est sans doute préférable de se référer à la planche intitulée "Officier Dignitaire dans ma Respectable Loge".

    R:. F:. A. B.

    Bibliographie

    Baudouin Bernard - Dictionnaire de la Franc-maçonnerie

    Editions De Vecchi, Paris, 1995 - Pages 40 à 142

     

    Boucher Jules - La Symbolique maçonnique

    Editions Dervy, Paris, 1995 - Page 106

     

    Ferré Jean - Dictionnaire des symboles maçonniques

    Editons du Rocher, Monaco, 1997 - Pages 232 à 244

     

    Ferré Jean - Dictionnaire symbolique et pratique de la Franc-maçonnerie

    Editions Dervy, Paris, 1994 - Pages  240 et 241

     

    Guigue Christian La formation maçonnique

    Editions Guigue, Mons-en-Baroeul, 1993 - Page 261

     


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  •  Une approche de la gnose 

    Avertissement

    Après avoir découvert le mot « gnose » au grade de Compagnon comme une des associations possibles de la Lettre « G », j’ai eu l’occasion de rencontrer ce mot occasionnellement dans certains ouvrages de Maçonnerie. N’ayant qu’une trop vague idée de son sens, j’ai enfin pris le temps d’effectuer des recherches et j’ai le plaisir de vous les faire partager.

    Le contenu de la présente planche n’est pas un ensemble de réflexions personnelles mais la synthèse d’une recherche d’informations. Le but poursuivi est donc de tenter de mieux comprendre ce qu’est la gnose ainsi que le gnosticisme, une nébuleuse de systèmes mystico-philosophico-religieux, datant des 2ème et 3ème siècles de l'ère chrétienne, qui se ressemblent un peu, mais qui en même temps sont très divergents et changeants. Ce système est aussi appelé « gnosticisme » et ses partisans des « gnostiques ».

    Introduction

    Qu’est-ce que le gnosticisme ?

    Le gnosticisme est l'enseignement basé sur la gnose, qui est une connaissance intérieure issue de l'intuition. La gnose est donc une expérience personnelle qui s'exprime à travers le mythe, celui-ci étant l'expression symbolique de ce qui ne peut s'exprimer par le dogme.

    Le gnosticisme est un terme forgé par les Pères de l’Eglise pour désigner une frange hétéroclite d’hérésiarques (c’est ainsi que leurs adversaires les désignent !) qui est apparue dès les débuts de l'ère chrétienne. Néanmoins, il est possible que certains d'entre ces groupes aient revendiqué le terme.

    Qu’est-ce que la gnose ?

    Il est difficile de donner une définition de la gnose. Ce mot vient d'un mot grec qui signifie connaissance, mais connaissance de quoi ?

    Les mythes gnostiques peuvent être interprétés de différentes façons en fonction de l'expérience spirituelle de chacun. Ils portent toujours en eux une part de vérité profonde et font appel à « l'intelligence du cœur » plus qu'à l'usage de la raison.

    Les gnostiques décrivent la manière dont l’homme de Lumière, l’homme primordial est vaincu par les puissances du Mal et, finalement, divisé en mille fragments dispersés dans la matière comme étincelles de lumière. Sa rédemption prend consistance dans le rassemblement des parties dispersées du grand homme, dans leur réunification et dans leur retour à la plénitude (le plérôme) d’où il était tombé.

    Le cosmos

    De nombreuses religions s'entendent pour dire que le monde est imparfait. Mais elles diffèrent le plus souvent dans leurs propositions face à cette imperfection.

    Les gnostiques, à l'image des bouddhistes, pensent que le monde est imparfait par nature parce que le principe même de sa création est générateur d'imperfection. Le monde est souffrance et l'une des premières prises de conscience de l'être humain est celle qui l'amène à constater qu'il vit dans un monde absurde lié à la mort.

    Si la Bible lie l'imperfection du monde à une faute originelle, une faute de l'homme, les gnostiques la lient à la nature aliénante de la création et donc du créateur, ce qui pour la religion judéo-chrétienne est un blasphème.

    Si l'on compare la gnose à la philosophie orientale, on constate que des notions telle que celle du karma sont assez proches de la conception gnostique. Cette roue du karma illustre l'enchaînement des causes et des effets qui entraînent la souffrance et l'imperfection. Le karma est le principe fondamental des religions indiennes qui repose sur la conception de la vie humaine comme maillon d’une chaîne de vies, chaque vie étant déterminée par les actes accomplis dans la vie précédente.

    Pour les gnostiques, il existe bien un Dieu transcendant mais ce Dieu n'est pas le Dieu créateur ou plutôt pas directement. Ce n'est pas de lui mais de ses émanations que découle la création.

    Ces émanations sont les « éons », intermédiaires entre le Dieu ultime et la création. Un de ses « éons », Sophia, la Sagesse, est d'une importance primordiale pour les gnostiques. Elle est la dernière émanation donc la plus proche de la manifestation et de son Créateur.

    L'être humain

    La Nature de l'Homme est double comme celle du Monde, à la fois être de chair et être de Lumière. Il participe à la Nature du monde et à celle du Vrai Dieu. Cette part de Lumière est l'essence divine ou l'atome divin.

    L'Homme est en général inconscient de la présence de cet atome divin en lui. Cette ignorance est entretenue par le Créateur et ses Archons qui maintiennent l'humanité dans l'illusion d'une réalité matérielle.

    La mort, en défaisant les liens, libère temporairement l'atome divin de sa prison de chair.

    Mais tous les êtres humains ne sont pas égaux vis-à-vis de la spiritualité.

    On distingue les penumatiques (spirituels), les matérialistes (hylétiques) et les psychiques. L'évolution humaine part de l'esclavage du matérialisme, passe par le biais de la religiosité et de la morale et aboutit à la libération spirituelle.

    Le salut

    L'évolution naturelle est lente : elle est ralentie par l'inertie de notre nature matérielle. Pour évoluer sur le chemin spirituel, l'Homme a besoin d'aide.

    Les êtres de Lumière, messagers divins, ont pour fonction d'aider le genre humain dans leur quête de la gnose. Parmi eux, Mani, Seth, Jésus, incarnations du Christ, le Logos.

    Le potentiel d'évolution spirituelle, quoique présent individuellement en chaque Homme, est facilité par les « sacrements » enseignés par les messagers divins.

    Comportements

    La gnose s'oppose à l'éthique et à la morale telles que nous les entendons.

    De tels systèmes font partie du Monde, celui du Démiurge et le servent.

    Pour le gnostique, les commandements et les lois morales ne conduisent pas au salut mais à des modes de comportements acceptables d'un point de vue social.

    La morale du gnostique est fonction de son évolution. Elle implique surtout le respect des autres et de leur liberté. Il importe que chacun se forge sa propre loi morale en regard de son évolution.

    Le gnosticisme encouragera toujours le détachement et le non-conformisme à l'égard des choses du Monde. « Etre dans le monde, mais non du monde ».

    Destinée

    Dans l'Evangile de Thomas, Jésus dit que l'être humain doit arriver par la gnose à connaître l'ineffable réalité divine dont il est issu et où il doit retourner.

    La mort ne libère pas l'Homme de l'emprise du Démiurge.

    Ceux qui n'ont pas atteint la libération par la gnose doivent revivre une nouvelle existence. Cette doctrine de la réincarnation est implicite dans les écrits gnostiques.

    Tentons d’aller un peu plus loin dans cette recherche d’informations.

    Les gnostiques

     Les gnostiques sont connus par un certain nombre de textes gnostiques qui ont été écrits par des gnostiques et retrouvés au fil des siècles. C’est ainsi qu’au 17e siècle, des voyageurs européens sont allés en Orient et ont trouvé des bouts de parchemin et de papyrus écrits par des gnostiques, et surtout par la découverte en 1945 d'une bibliothèque gnostique en Egypte - textes dits de Nag Amadi.

     Les gnostiques sont aussi connus par leurs adversaires et notamment les théologiens chrétiens. Parmi ceux-ci citons Irénée de Lyon (autour de 180), auteur d’un livre intitulé « Contre les hérésies », mais dont le titre exact est : « Dénonciation et réfutation de la prétendue gnose aux noms menteurs », ce qui sous-entend qu'il y a une vraie connaissance, une vraie gnose. Malheureusement, beaucoup de ces documents ont été perdus ou détruits et il ne reste plus que des fragments d'informations.

    Quelques caractéristiques des gnoses

    • Dans ces différents systèmes gnostiques, il y a l'idée d'une opposition entre le bien et le mal, que l'homme a été plongé par une espèce de déchéance dans le mal, et que la gnose est la connaissance d'un salut qui mène de l'homme vers Dieu. C'est une technique de salut fondée sur le dualisme bien-mal.
    • Une deuxième caractéristique du gnosticisme est l'élitisme. Les gnostiques, surtout ceux qui vivaient dans des milieux très proches du christianisme, étant eux-mêmes d'ailleurs issus du christianisme, disaient : « nous sommes beaucoup plus au courant que les autres : nous sommes les initiés ; Nous connaissons des choses que les autres ne savent pas ».

    C'est cet élitisme qui fait que la vraie connaissance fait partie d’un secret. Accéder à la gnose, c'est en quelque sorte une initiation.

    Pour les gnostiques, l'humanité se divise en trois catégories :

    • ceux qui sont d'emblée dans la bonne connaissance, les pneumatiques ;
    • ceux qui sont récupérables, les « psychiques » ;
    • ceux qui sont irrécupérables, les terrestres.

    Apparaît immédiatement une grande différence avec l'idéal chrétien, pour qui le message de Jésus-Christ, rapporté dans les Évangiles, est pour tous.

    Il est difficile de bien connaître quel était le culte ou la liturgie des gnostiques. Tout simplement parce que ce culte est secret et dérive des religions à mystère qui foisonnaient beaucoup dans le monde grec hellénistique de l'époque où il n’était possible de participer à un groupe religieux que si l'on était initié. Quelques bribes de renseignements existent quand même. Là aussi il y a une certaine récupération de certains rites chrétiens, mais avec une tendance très forte à un mélange de magie, d'astrologie…

    La gnose se caractérise par le syncrétisme. Des éléments ont été récupérés d'un peu partout : dualisme persan, textes de Platon, évangile de Thomas, qu'on retrouve dans la bibliothèque de Nag Amadi. Ceci a donné entre autres naissance au manichéisme (la religion de Mani), qui a été une religion qui a failli s'étendre partout. On sait que saint Augustin, en Afrique du Nord, était d'abord manichéen avant de devenir chrétien, et Marco Polo a rencontré des groupes de manichéens en Chine.

    La Création est mauvaise : elle n'est pas le fait de Dieu mais d'une divinité mauvaise, d'un démiurge. Mais cette idée, qui est extrêmement forte dans toute la gnose, c'est que Dieu n'a pas pu faire cette création mauvaise. Donc, la création est le fruit d'une divinité, ou d'un être, ou d'un accident, mais qui est fondamentalement mauvais. Cela implique le rejet du Dieu créateur tel que l'Ancien Testament l'affirme. Et c'est pourquoi un système gnostique a été créé par un certain Marcion (aux alentours de 180).

    Autre conséquence de cette création mauvaise, c'est que la création, la matière, la chair, c'est mauvais, donc il ne peut pas y avoir de résurrection, parce que la résurrection continue à enfermer dans un corps et c'est pourquoi beaucoup de systèmes gnostiques parlent, eux, d'une réincarnation. Dans certains textes, il apparaît que cette réincarnation peut être la conséquence d'une punition, d'une chute. L'idée du gnostique c'est de monter vers la divinité pour se libérer de ce monde mauvais.

    Autre caractéristique des gnoses, c’est l’importance de l'élément féminin - thème de la Mère. Cette mère est décrite de manière très contradictoire, souvent comme pouvant être un instrument de condamnation, de jugement, mais aussi comme étant une mère mais une mère au-delà de la maternité qui enferme dans la création. Dérivant de cela, quelle est la place de la sexualité dans la gnose ? Là aussi c'est très contradictoire : il y a des mouvements qui vont être très ascétiques, qui vont refuser le mariage, qui vont refuser la sexualité, parce que c'est la porte ouverte à la procréation qui va enfermer, qui va faire tomber une âme dans la chair. D'autres courants, au contraire, vont avoir une sexualité débridée, pornographique, toujours par mépris de la chair. Y aurait-il un lien avec la mariologie naissante ? Il apparaît en tout cas que les mouvements gnostiques étaient très ouverts aux femmes et que celles-ci n’étaient pas rejetées.

    Les systèmes gnostiques se caractérisent aussi par le fait qu'il y a entre Dieu et les hommes tout un système d'intermédiaires qui n'est pas le fruit de la création. On emploie plutôt le mot d'émanation ainsi que le mot « éon », mot qu'on trouve dans le Nouveau Testament. L'expression « aux siècles des siècles » correspond à l'espace et au temps.

    Enfin, dernière caractéristique des gnoses, c’est la récupération de la personne de Jésus-Christ lui-même, mais en le divisant : Jésus d'un côté, Christ de l'autre. Jésus est l'homme incarné ; il est né, il est mort mais il a reçu, à un certain moment de sa vie, soit dès sa naissance, soit au moment du baptême, le Christ, le Christ étant là une entité différente. Du coup, il peut y avoir d'autres « Christ », par exemple Mani qui a été identifié à Jésus. - Il y a cette idée que la révélation chrétienne est bien, mais insuffisante, alors on rajoute le manichéisme, ou l'Islam, ou les Mormons, ou Moon.

    Jésus et la Gnose

    Y a-t-il eu un courant pré-agnostique qui aurait influencé certains écrits du Nouveau Testament, dont par exemple ceux de Jean ?

    • Les documents que nous avons sur la gnose sont des documents post-chrétiens, mais on voudrait savoir si on ne trouve pas de la gnose ou des allusions à la gnose dans le texte du Nouveau Testament et certains théologiens ou exégètes se sont demandé s'il n'y avait pas quand même un ou plusieurs courants gnostiques qui auraient influencé les écrits du Nouveau Testament. On peut dire que les documents sur lesquels nous sommes bien renseignés datent des 2ème et 3ème siècles : ce sont des documents qui récupèrent des notions chrétiennes, donc qui sont influencés par le christianisme ; à l'inverse, il est difficile de dire si le christianisme a été influencé par la gnose, vu qu'il y a plusieurs gnoses.
    • Dans les textes de Jean comme dans ceux de Paul, il y a des allusions aux gnostiques : il est question d'adversaires mais qui ne sont pas définis, on ne connaît pas leur religion. Il y a des adversaires dans la Ière lettre de Jean et certains pensent que ces adversaires étaient des gnostiques, mais on n'en est pas sûrs. Dans les textes de Jean, on voit deux allusions à une polémique contre les thèmes gnostiques :

    a) Il y a la question du dualisme johannique: par ex. la lumière/les ténèbres, c'est une expression qu'on trouve chez tous les gnostiques puisqu'il faut être sauvé vers la lumière attirée des ténèbres, mais, la plupart du temps, le dualisme de Jean n'est pas un dualisme d'opposition entre un bien et un mal. Exemple : la vue et la foi.

    b) D'autre part, il y a l'importance accordée à l'incarnation. On dit souvent que Jean c'est le spirituel, pourtant par beaucoup de détails on s'aperçoit que Jean insiste sur la réalité historique, charnelle de Jésus. Ex : « du sang a coulé de son flanc » « Jésus pleure devant la mort de Lazare ». Il y a cette insistance sur l'incarnation comme s'il y avait déjà, dans un certain nombre de milieux chrétiens, une certaine contestation de cette réalité terrestre de Jésus et qu'on glissait vers le docétisme c'est-à-dire de dire qu'il n'y a qu'une apparence. Le vrai Jésus, c'est Jésus qui est le fils de Dieu, mais qui n'est pas l'homme qui a vécu sur cette terre. De nouveau on constate cette séparation entre Jésus de Nazareth et un Christ difficile à définir.

    • Dans les écrits de Paul, on peut se demander si certaines expressions ne sont pas aussi des allusions à des pensées plus ou moins gnostiques, par exemple. l'emploi du mot « plénitude », cher aux gnostiques.

    Il faut penser qu'autrefois le christianisme était une toute petite chose, une pensée parmi un tas d'autres pensées dont il a essayé de se démarquer. Ce qui est intéressant de noter c'est que les premiers chrétiens ont voulu préciser ce qu'ils pensaient. C'est ainsi que la plupart des théologiens des 4 premiers siècles (dont Irénée de Lyon) ont voulu clairement exprimer leurs convictions.

    Qu'est-ce que l'hérésie ? Ce n'est pas du tout le contraire de la vérité, mais une vérité cancérisée, c'est-à-dire qu'on ne dit qu'un bout de la vérité. Ainsi il faut dire : Jésus est Dieu ET homme, Dieu est un ET trois, la trinité. C'est-à-dire qu'il faut tenir en tension des vérités qui paraissent contradictoires. C'est tout ce travail qui s'est fait dans les premiers siècles.

    Irénée de Lyon a une très belle formule : « les hérétiques, c'est toujours quelqu'un qui ne veut retenir qu'un seul évangile ; ainsi les gnostiques vont retenir Jean ; Marcion ne va retenir qu'un seul Évangile, alors qu'il faut garder les 4 Évangiles, avec leurs contradictions pour rechercher la vérité.

    Et aujourd’hui ?

    Il est très important pour nous de nous demander : est-ce que c'est important pour nous ou non d'avoir une idée précise de ce que nous croyons ? C'est-à-dire de nous replacer dans cette même attitude qu'ont eue les premiers Chrétiens et les premiers théologiens de ces premiers siècles, car nous pouvons retrouver un certain nombre de courants semblables à la gnose.

    Ce qui semble totalement manquer dans le système des gnostiques, c'est la foi, c'est-à-dire cette idée d'une relation directe avec Dieu qui permet la relation directe avec les autres. Et c'est pour cela qu'un certain nombre de théologiens, comme Irénée ont dit : l'amour est très important parce que c'est la relation avec l'autre. Alors que dans la plupart des systèmes gnostiques il y a toujours des intermédiaires, une vision pessimiste et une espèce de racisme.

    L’origine des gnostiques

    Gnose, du grec « gnôsis » (« connaissance »), signifie « connaissance parfaite ». Ce qui caractérise les mouvements gnostiques n’est pas cette « connaissance » que d’autres traditions prétendent aussi posséder, mais plutôt la définition de Plotin : les gnostiques, ce sont « ceux qui disent que le Démiurge de ce monde est mauvais et que le Cosmos est mauvais ».

    Selon les témoignages des historiens anciens, c’est dans un cadre géographique allant de la vallée du Jourdain à l’Asie Mineure que les sectes se sont manifestées à l’époque des apôtres, avec Simon à Samarie, Nicolas à Antioche. Ils appuient leur réflexion sur des textes de l’Ancien et du Nouveau Testament dont certains sont considérés aujourd’hui comme apocryphes, marqués de l’hellénisme. Parmi ces livres, le Livre d’Hénoch est un des rares à nous être parvenu.

    Vers 120, les sectes ont gagné Alexandrie, autour de Basilide, Carpocrate et Valentin (Valentinus ou Valentinius). Valentin se rendit à Rome, où sa gnose voila ses mythes orientaux d’une exégèse philosophique mêlée de christianisme.

    À Rome, des sectes fortement influencées par les éléments orientaux ont continué d’affluer. Les sectes se sont propagées, notamment en Espagne.

    En Asie, de nouveaux inspirés ont surgi : Mani qui a fait une vaste synthèse des nombreux enseignements, et Audi, un chrétien qui s’est séparé de l’Église après Nicée.  De l’Orient, le gnosticisme s’étendit jusqu’à la Chine.

    Parmi les sectes, on retrouve : les Kantéens en Iran, la secte importante des Séthiens disciples de Simon le Magicien, les Barbélognostiques, les Archantiques, les Ophites (ou Naassènes) aux pratiques hérités des mystères grecs, les Pérates, les Caïnistes, ces derniers louant Caïn le fils prodigue d'Adam et Eve.

    Il semble qu’il y ait eu un gnosticisme à l’intérieur même du judaïsme, contemporain des sectes gnostiques traditionnelles, et dont les échos se sont perpétués dans la Kabbale. Cette filiation s'expliquerait par l’hypothèse midrashique : de même que la méthode midrashique appliquée au texte grec de la Septante aurait fini par produire les textes évangéliques, de même aurait-elle produit les textes deutérocanoniques puis gnostiques puis coraniques.

    Les sources

    La plupart des essais anciens ont, faute de pouvoir s’appuyer sur des documents gnostiques originaux, hérité des erreurs d’appréciation des réfutateurs chrétiens qui combattirent les sectes, aux 4ème et 5ème siècles, qui parfois se recopient les uns les autres, et sans tenir compte des mythologies orientales sur les vestiges desquelles le gnosticisme s'était développé.

    L'une des principales sources concernant le gnosticisme est Irénée de Lyon (2ème siècle après Jésus-Christ). Il décrit dans les détails les doctrines gnostiques qu'il a combattues, de manière à prouver qu'il n'y avait que peu de choses en commun entre la gnose et le christianisme. À cette époque, des gnostiques grecs se faisaient baptiser, mais tenaient à concilier leurs doctrines avec leur nouvelle religion. L'une des principales différences entre gnose et christianisme tient à la conception du Salut. Le christianisme exotérique le propose à tous tandis que la gnose, dans son ésotérisme, le réserve aux initiés.

    Des réfutateurs, les plus anciens témoignages datent de la Bible elle-même, qui dénonce les hérésies et les faux prophètes, dont Simon de Samarie et le diacre Nicolas.

    Pour la période jusqu’au 3ème siècle, on ne possède que les récits des hérésiologues.

    L’établissement d’une histoire précise des mouvements gnostiques est impossible à cause de ce flou, et des livres dont les titres changent d’une version à l’autre et dont les véritables auteurs restent anonymes.

    Sur la période du 3ème au 5ème siècle, les sectes se sont étendues en Egypte, où le sable conserva des écrits en copte. C’est pourquoi on retrouva, à partir de 1800, des textes dans les nécropoles égyptiennes.

    L'Évangile de Marie, le Livre secret de Jean et la Sophia de Jésus-Christ ont été achetés en 1896 en Egypte, dans un même lot de parchemins. En décembre 1945, plus de 40 écrits perdus furent retrouvés dans une jarre à Nag Hammadi, dont en premier lieu des écrits de sectes orientales, mais aussi des apocryphes chrétiens et gnosticisme. Cependant, cette bibliothèque n’est qu’un « instantané » de la pensée gnostique de l'époque, les textes y étant constamment remaniés et modifiés.

    Retenons quelques traités gnostiques :

    • L’Evangile de vérité ;
    • L’Evangile selon Thomas ;
    • L’Evangile selon Marie ;
    • La Pistis sophia ;

    ...

    Très peu de monuments ou objets relatifs aux gnostiques ont été retrouvés.

    Destin du gnosticisme

    Les condamnations de plus en plus dures de la part des églises chrétiennes ont obligé les sectes gnostiques à se cacher, puis à disparaître.

    Les Bogomiles et les Cathares du Moyen Age ont repris des conceptions gnostiques, sans qu'on sache s'ils descendaient de groupes gnostiques ayant survécu depuis l'Antiquité, ou s'ils étaient des résurgences suscitées par la transmission d’écrits gnostiques déguisés en apocryphes chrétiens.

    Des survivances plus sérieuses de la gnose la plus philosophique se cachent dans la littérature alchimique, notamment les textes attribués à Hermès Trimégiste. De même, il y a intercommunication entre la littérature juive kabbalistique et certaines doctrines du gnosticisme hellénisé.

    En Orient, l’invasion de l’islam permit aux sectes de survivre. Aux confins de la Mésopotamie et de l’Iran certaines sectes ont survécu jusqu’au 12ème siècle.

    On trouve une influence du gnosticisme chez les musulmans chiites, particulièrement dans la foi druze.

    En plus des cathares et des bogomiles, on trouve des traces de pensée gnostique chez les ranters, le Libre-Esprit et divers mouvements millénaristes.

    Les thèmes principaux

    Les auteurs gnostiques abordent la plupart des thèmes mythologiques et eschatologiques, les réinterprètent en passant par la révélation d’une « histoire secrète », d'un mythe total : l’origine et la création du Monde ; l’origine du Mal ; le drame du Rédempteur divin descendu sur Terre afin de sauver les hommes ; la victoire finale du Dieu transcendant, conduisant à la fin de l’Histoire et l’anéantissement du Cosmos.

    Le point de départ est la considération, par l’individu, de sa situation face au monde : que suis-je ? Pourquoi ce monde me semble t-il étranger ? Qu’étais-je à l’origine et comment (éventuellement) revenir à cette situation ?

    C’est la prise de conscience d’une déchéance impliquant que le Bien et le Mal sont deux éléments inconciliables, absurdement mêlés ici-bas par un accident contraire à la volonté divine. La révolte intime contre le Mal est la preuve de l’appartenance au Bien, à un absolu parfait extérieur à ce monde.

    L’humanité est divisée en trois catégories :

    • ceux qui se sentent (donc, se savent) pourvus d’une perfection innée dont la nature est esprit : les pneumatiques ;
    • ceux qui n’ont qu’une âme et point d’esprit, mais chez qui le Salut peut encore être introduit par instruction : les psychiques ;
    • enfin, les êtres dépourvus d’esprit et d’âme, uniquement constitués d’éléments charnels voués à la destruction : les hyliques.

    Le but premier du gnostique est la délivrance de sa parcelle divine, aliénée dans un monde matériel corrompu, et sa remontée vers les sphères célestes. Cette délivrance passe par la gnose, la connaissance parfaite de la nature de l’esprit, des structures de l’univers, de son histoire passée et future.

    Le premier aspect de la gnose porte sur les origines du monde matériel et de l’homme, le Mal s’expliquant par la chute accidentelle d’éléments supérieurs dans un cosmos matériel, temporel et sexué, au fond duquel ils se sont disjoints, dispersés et emprisonnés sans pour autant perdre leur pureté.

    Le second aspect de la gnose vise la destinée de l’humanité et du Cosmos, aboutissant à la dissolution finale de la matière, à la libération de l’esprit et au retour à l'unité parfaite intemporelle dont les élus, ici-bas, gardent le souvenir.

    Le monde supérieur ayant seul été organisé par une intelligence authentiquement créatrice, le matériel n’en est qu’une copie maladroite. De même, l’homme terrestre est l’image imparfaite d’un modèle céleste. On voit l’idée de décadence puis de rédemption.

    Pour les élus, le salut peut être personnel, alors que pour les autres le rachat se fera par une eschatologie générale ayant pour terme la destruction de l’univers matériel.

    Du Pro-Père au Démiurge

    À l’origine de tout, un éon parfait, invisible, inconcevable et éternel, habité par un Être absolu et immuable, le Pro-Père, replié sur lui-même et coexistant avec sa Pensée qui est, elle, Silence absolu.

    De cette unité primitive du Pro-Père et de sa Pensée émane une seconde image du Père. Cette première émanation est dégagée de l’isolement primordial et capable d’engendrer. Elle suscite alors l’apparition des trente éons hiérarchisés du Plérôme. On y retrouve : Monogène, Logos, Mère céleste, Homme primordial, Fils de cet Homme (ou Seth céleste), grande Génération des Fils de l’Homme primordial, Sophia (Sagesse, parfois qualifiée de lascive), etc. Ces éons vont par couples, féminin/masculin, appelés syzygies.

    Les éons sont, en même temps que des personnifications de concepts, des univers à part entière, infinis et éternels, reproduisant le schéma général du Plérôme tout entier et de l’Inengendré suprême.

    L’opposition entre le monde idéal de la Lumière et celui, imparfait, des Ténèbres et de la Matière peut suivre 3 schémas.

    Les plus radicaux situent, à l’origine de la création du monde matériel, une subite agression des eaux ténébreuses préexistantes contre la Lumière d’en haut, attaque qui se déroule dans l’espace intermédiaire d’un troisième principe, air ou vide. On retrouve ce thème chez les bogomiles et les manichéens.

    Plus fréquemment, la Lumière d’en-haut préexiste seule à toute création. Un accident survenu dans le monde supérieur engendre une puissance difforme et ignorante, Ialdabaôth, autour de qui se forme un éon ténébreux, notre bas monde. La Lumière entreprend une œuvre salvatrice pour anéantir cet éon maléfique.

    Selon une première variante, Sabaôth, le fils d’Ialdabaôth, va découvrir la Lumière et sera mis par les puissances supérieures à la place de son père pour engager le cosmos vers le salut. Une seconde variante montre Ialdabaôth revenant lui-même au bien.

    Les diverses divinités sont considérées comme perverses, liées au monde matériel, tel le Démiurge de la Bible. Les gnostiques n’emploient pas le terme « Dieu » pour désigner l’Être infini dont tout le monde supérieur émane.

    L’homme

    Parmi les éons, il y a l’Homme (primordial) ainsi que le Fils de l’Homme. C’est à partir de son reflet que le Démiurge et ses archontes décident de fabriquer l’homme, Adam.

    Le Père, grâce à ses anges déguisés en archontes, suggère au Démiurge d’insuffler son esprit, la Lumière dont il s’était emparé, à Adam.

    La Lumière est ainsi passée à l’humanité. De rage, les archontes emprisonnent Adam dans l’Eden, vu comme un lieu terrible. Les puissances d’en-haut cachèrent la gnose et la vie dans le fruit défendu, et envoyèrent un Sauveur sous la forme du serpent pour inciter Adam et Ève à s’emparer de ces secrets.

    Les archontes installent en Adam un second esprit, le contrefacteur, qui va sans cesse combattre les mouvements de l’esprit tiré vers le haut.

    Le premier couple est expulsé de l’Eden par le Démiurge, furieux. Il souille Ève de sa lubricité, ce qui explique la génération d’Abel et Caïn. La vraie postérité d’Adam ne commence qu’avec Seth, dont seule la descendance, les parfaits, est promise au salut.

    Le Démiurge envoie le Déluge pour anéantir les parfaits, mais Noé s’abrite avec les siens dans l’Arche et au final c’est la race, née de l’union des anges du Démiurge et des filles de la terre, qui est anéantie.

    Les archontes sont liés à la voûte céleste, au mouvement des planètes.

    Chaque partie de l’homme, physique ou psychique, appartient souverainement à la puissance de la voûte céleste qui l’a façonnée. Dans ce corps assemblé descend une âme qui, traversant l’un après l’autre chacun des cieux des planètes, y reçoit, en fonction du moment de ce passage, telle ou telle disposition par laquelle l’individu restera soumis aux astres.

    Enfin, les puissances insinuent dans le fœtus l’esprit contrefacteur destiné à contrarier les pulsions éventuelles de l’homme vers le salut.

    Le mélange de tous ces facteurs entraîne des degrés de perfection fort différents qui expliquent les 3 grandes catégorisations de l’humanité (pneumatique, psychique ou hylique).

    L’eschatologie

    Le Démiurge ne cesse d’envoyer contre les parfaits des cataclysmes et persécutions.

    Il faut éveiller les élus en leur rappelant leurs racines célestes. Pour cela, des sauveurs et des prophètes sont envoyés d’en-haut pour dispenser confidentiellement leurs révélations. L’acte final du salut de l’humanité est la descente d’une puissance de la Lumière jusqu’au fond des Enfers.

    L’œuvre salvatrice est associée à la descente de la Mère Céleste dans les abîmes où l’humanité est prisonnière, mythe remontant à la descente d’Ishtar aux Enfers. Seth aurait eu une incarnation céleste, et les mages (Zoroastre, etc.) sont les prophètes gardiens de l’enseignement secret de Adam et Seth.

    La figure de la Mère sera remplacée par celles de Seth puis du Christ.

    Annoncé par un signe des cieux, le Sauveur va descendre, d’abord déguisé en archonte des cieux inférieurs, puis revêtu de toute sa gloire. Les gnostiques répugnant à l’idée d’incarnation, le Sauveur est incorporel.

    Dans certaines versions du mythe, le Sauveur doit subir les conséquences humiliantes de l’incarnation pour transmettre son message à quelques élus avant de retourner au Ciel. Parfois il oublie sa mission et doit être lui-même sauvé (mythe du « Sauveur sauvé »).

    L’amnésie de la condition originale est une image spécifiquement gnostique. En se tournant vers la Matière, l’âme oublie sa propre identité. C’est la mort spirituelle. Le mythe du Sauveur Sauvé tourne autour de cette notion d’amnésie, qu’illustre l’Hymne de la Perle, dans les Actes de Thomas. La découverte du principe transcendant à l’intérieur de Soi-même constitue l’élément central de la religion gnostique. Cette redécouverte, l’anamnèse, est obtenue grâce à un messager divin et grâce à la gnose.

    Le symbole du sommeil est également utilisé dans ces mythes. C’est un symbole archaïque universellement répandu dans la quête de l’initiation. Ne pas dormir, ce n’est pas seulement triompher de la fatigue physique, mais surtout faire preuve de force spirituelle. Rester « éveillé », être pleinement conscient, veut dire : être présent au monde de l’esprit.

    Chez les gnostiques, l’image de l’ivresse est aussi employée.

    Finalement, le rédempteur remontera aux Cieux, occasion d’un bouleversement céleste qui fixera les archontes aux planètes, traversant la voûte céleste à l’endroit d’un X gigantesque considéré comme la Croix céleste.

    Ce phénomène de la crucifixion sur le X céleste est déjà attesté à Rome au moment de l’avènement du règne d’Auguste, à qui on attribue déjà l’abolition de la Fatalité astrale.

    La crucifixion céleste avait été adoptée par certains chrétiens mais fut vite abandonnée.

    Les gnostiques se croyaient presque parvenus à la fin des temps. Les livres prétendument gardés secrets venaient d’être ressortis de leurs cachettes.

    Pour les Parfaits, l’enseignement portait sur les mystères de la descente et de l’ascension du Sauveur/Christ à travers les 7 cieux habités par les anges, et sur l’eschatologie individuelle, c'est-à-dire l’itinéraire mystique de l’âme après la mort. Cette tradition prolonge l’ésotérisme juif et d’ailleurs sur l’ascension de l’âme et les secrets du monde céleste.

    L’âme après la mort

    L’homme est asservi aux puissances des cieux visibles qui l’ont façonné. Les gnostiques pensent pouvoir réduire leur puissance en employant des conjurations contenant les noms secrets de ces puissances. Ils mettent également en place des rites pour échapper aux égarements de l’esprit contrefacteur.

    Au moment de la mort, un élu muni de tous les sacrements de la gnose fait son ascension à travers les cieux sans retour : il présente les sceaux aux gardiens pour que les portes lui soient ouvertes.

    Des autres, les moins souillés sont purifiés dans les purgatoires des espaces célestes, montant parfois d’une sphère à l’autre lors d’une conjonction astrale. Mais bien des malheureux sont rejetés vers le bas, tourmentés en Enfer, avant d’être soumis à l’oubli de leur vie précédente et rejetés dans de nouveaux corps.

    La morale

    Les gnostiques, voyant le corps charnel asservi dans ses actes et ses passions à la souveraineté des planètes, ou encore se croyant pourvus d'une grâce d'en-haut qui délivre des actes ici-bas, n'ont pas de notions de moralité individuelle très strictes.

    La gnose peut donc aussi bien conduire à un ascétisme rigoureux qu'à de curieuses immoralités, avec la volonté de contredire en tout la loi biblique. La chair appartenant à la matière et ne sachant participer au Salut, peu importe qu'elle fût souillée. Les pratiques licencieuses de certains groupes gnostiques sont réprouvées par d’autres groupes gnostiques comme par les réfutateurs chrétiens.

    Enfin l'héritage de certains mystères grecs (par exemple chez les Naassènes) put être à l'origine de comportements immoraux en leur donnant une valeur mystique.

    Organisation des sectes

    Les gnostiques foisonnaient en d’innombrables groupuscules. Il y aurait eut trois grades : les « commençants », les « progressants » et les « parfaits ». L’enseignement ésotérique aux fidèles portait sur le symbolisme du baptême, de l’eucharistie, de la Croix, sur les Archanges et sur l’interprétation de l’Apocalypse.

    L'enseignement gnostique était secret. Pour éviter d'être repérée, la gnose se dissimulait, évitant d'imposer des manières de vivre voyantes. On connaît mal l'organisation interne des sectes. Des témoins anciens, seul Epiphane a essayé de pénétrer la vie des sectes.

    Les parfaits sont voués au respect de tous les préceptes de la gnose et leur identité première s'efface devant quelque surnom mystique. Les simples fidèles qui continuaient leurs existences impures en subvenant aux besoins des élus.

    Les premiers fondateurs, et parfois leurs successeurs, s’étaient présentés comme des prophètes ou des incarnations de puissances célestes.

    À des fins de propagande, les gnostiques se présentaient d'abord aux chrétiens comme leurs frères, ne dévoilant que les croyances les plus proches, puis en posant des questions ébranlant l'interlocuteur. De même, ils travestissaient certains de leurs textes en leur donnant une apparence plus orthodoxe.

    Enfin, tout comme le christianisme s’est répandu par la thaumaturgie, la gnose attirait par la magie et l'astrologie, très répandue au début de l’ère chrétienne, qui tenaient une place très importante dans leurs écrits.

    Les rites étaient divers. Les uns individuels, les autres collectifs, destinés aux divers échelons des initiés, et donc plus ou moins secrets. Il s'agissait principalement de baptêmes, d'onctions, d'impositions des mains, de communions, d'agapes et d'unions spirituelles plus ou moins symboliques.

    Dans certains groupes, la frontière entre la gnose et les magies gréco-orientales est très perméable.

    Rapports avec le judaïsme, la philosophie grecque et le christianisme

    La Genèse, avec son imprécision quant à la création d’Adam, fut source de nombreuses exégèses qui distinguent l’œuvre créatrice elle-même et l’acte créateur de Dieu. Ainsi Philon d’Alexandrie distinguait la puissance de miséricorde et de bonté, en tout supérieure, et la puissance créatrice qui lui est subordonnée.

    Le gnosticisme grec s’est calqué sur la philosophie mystique grecque de Philon : on retrouve le vocabulaire technique et les procédés d’argumentation. C’est en langue grecque que le gnosticisme atteignit son développement le plus complet.

    Le Livre d’Hénoch connaissait déjà le mythe de la Fatalité vaincue par une intervention d’en-haut qui aurait enchaîné les astres, jusqu’alors maîtres des hommes et de leurs destinées, épisode situé au temps de Noé ou peu après le Déluge. Il se retrouve chez les gnostiques chrétiens, surtout chez Valentin.

    À côté des 4 Évangiles et des Actes circulaient d’autres textes comportant la relation d’une doctrine ésotérique, communiquée aux Apôtres par le Christ ressuscité et concernant le sens secret des événements de sa vie. Ces livres sont qualifiés d’apocryphes. C’est de cet enseignement secret, conservé et transmis par la tradition orale, que se réclamaient les gnostiques chrétiens. Au 3ème siècle, les néo-platoniciens représentés par Plotin et ses disciples s’opposèrent aux sectes gnostiques locales.

    Pour conclure, du moins provisoirement

    Cette planche ne contient pas de réflexions personnelles. J’ai tenté de synthétiser des informations au sujet de la gnose, des gnostiques et du gnosticisme.

    Résumons cette longue synthèse : la gnose est plus une « affaire de cœur » qu'une question de concepts. Elle peut donc aussi bien conduire à un ascétisme rigoureux qu'à de curieuses immoralités, avec la volonté de contredire en tout la loi biblique.

    Tout comme le christianisme s’est répandu par la thaumaturgie, la gnose attirait par la magie et l'astrologie, très répandue au début de l’ère chrétienne, qui tenaient une place très importante dans les écrits des gnostiques.

    L'enseignement gnostique était secret. Les rites étaient divers. Les uns individuels, les autres collectifs, étaient destinés aux divers échelons des initiés, et donc plus ou moins secrets. Il s'agissait principalement de baptêmes, d'onctions, d'impositions des mains, de communions, d'agapes et d'unions spirituelles plus ou moins symboliques.

    C’est en langue grecque que le gnosticisme atteignit son développement le plus complet.

    Les gnostiques n'avaient pas de notions de moralité individuelle très strictes.

     

    R:. F:. A. B.

    Bibliographie

    Doignon Olivier - Comment naît une Loge maçonnique ?

    Editions La Maison de Vie, Lugrin, 2005

     

    Doresse Jean - Un article « Le gnosticisme dans histoire des religions », folio essais

     

    Lacarrière Jacques - Les gnostiques

    Collection Idées - Editions Gallimard, Paris, 1964

     

    Mircéa Eliade - Histoire des religions et idées religieuses

    Bibliothèque historique Payot, Paris, 1976

     

    Scopello Madeleine - Les gnostiques

    Editions Le Cerf, « Fides », Paris, 1991

     

    Des ouvrages plus spécialisés

     

    Assaraf Albert - L'hérétique, Elicha ben Abouya ou l'autre absolu

    Editions Balland, Paris, 1991

     

    Bavoux Gérard - Le porteur de lumière

    Editions Pygmalion, Paris, 1996

     

    Boyarin Daniel - Border Lines The Partition of Judaeo-Christianity

     

    Doresse Jean - Les livres secrets des gnostiques d'Égypte

    Editions Plon, Paris, 1958

     

    Grant Robert - La gnose et les origines chrétiennes

    traduit par J.H. Marrou - Editions du Seuil, 1964

     

    Maris Yves - Cathares - Journal d'une initiée

    Editions AdA, Québec, 2006

     

    Pagels Élaine - Les évangiles secrets

    Editions Gallimard, Paris, 1982 - Réédition de 2006

     

    Painchaud Louis - La bibliothèque copte de Nag Hammadi

    in « L'étude de la religion au Québec » : Bilan et prospective, sous la direction de Jean-Marc Larouche et Guy Ménard

    Les Presses de l'Université, Laval, 2001

     

    Puech Henri-Charles - En quête de la gnose

    Editions Gallimard, Paris, 1978

     


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  •  Le Frère Aumônier Hospitalier 

    La circulation du Tronc de la Veuve

    A l’issue de nos travaux, notre Vénérable Maître donne l’ordre au Maître des Cérémonies de faire circuler le sac aux propositions. Simultanément circule de la même façon le Tronc de  la Veuve – appelé aussi Tronc de Solidarité ou Tronc de Bienfaisance – véhiculé par le Maître des Cérémonies ou, s’il se fait aider, par un autre Officier Dignitaire appelé, au Rite (belge) moderne, le Frère Aumônier-Hospitalier

    Observons d’une part, que le Tronc de la Veuve est tout simplement un sac destiné à recevoir les oboles ; d’autre part, que le Sac aux Propositions comme le Tronc de la Veuve circulent entre les membres présents, en commençant par le Vénérable Maître et les Frères siégeant à l’Orient.

    L’origine du Tronc de la Veuve semblerait remonter aux bâtisseurs. En effet, des traces de dons ont été retrouvées, provenant de maçons, de tailleurs de pierre, de charpentiers… envers la famille d’un des leurs tué accidentellement sur le chantier.

    Mais symboliquement ou sentimentalement, cette pratique remonterait à la construction du Temple de Salomon. Lors de la mort d’Hiram, les Compagnons avaient en effet décidé de subvenir aux besoins de sa mère qui était veuve.

    Le Frère Elémosinaire, l’Aumônier hospitalier ou l’Hospitalier ?

    Dans tous les Rites de la Franc-maçonnerie et à tous les grades, « hospitalier » est le nom donné à l’un des Officiers d’un Atelier, qui a pour vocation d’appliquer l’idéal maçonnique de fraternité, et pour mission de collecter et redistribuer les aumônes, d’où cet autre nom désignant la même fonction : « Aumônier ».

    Quant à « Elémosinaire », c’est le nom du Frère Hospitalier au Rite Écossais Rectifié. Le mot trouve son origine dans la langue grecque : « eleemosyna » signifie aumône, donc argent. Le mot « hospitalier » sous-entend les soins donnés aux malades, le réconfort aux Maçons dans la  peine.

    Dans les loges qui travaillent au Rite Écossais Rectifié, le Frère Elémosinaire a la même mission, celle de recueillir les oboles du Tronc de la Veuve et de venir en aide aux Maçons qui sont dans le besoin.

    Lorsqu'il circule effectivement dans la Loge, précédé par le Maître des Cérémonies, le Frère Aumônier-Hospitalier présente le sac à tous les Frères présents : Apprentis, Compagnons et Maîtres, Visiteurs et Dignitaires. Les sommes recueillies sont ensuite comptabilisées avec l’aide du Frère Trésorier. Puis c’est au Frère Secrétaire d’en noter le montant dans le « Tracé de la Tenue », c’est-à-dire le procès-verbal des travaux.

    Le terme « Hospitalier » semble, en Maçonnerie, plus approprié pour désigner cette fonction essentielle. Tentons de comprendre pourquoi.

    Le rôle de l’Aumônier Hospitalier en dehors de la Loge

    Le travail de l’Hospitalier se fait essentiellement à l’extérieur de la Loge. Il doit donc avoir le temps matériel de remplir son office !

    Son rôle est très important et délicat car il doit apporter un soutien dans les moments difficiles. Il devrait être la personnification de la fraternité et de l’entraide maçonnique. C’est à lui de mettre en pratique, plus que tout autre Maçon, la fraternité et la charité. Cet office apparaît très difficile et très exigeant.

    Dans les loges qui comptent un assez grand nombre de Maîtres, ce poste est généralement confié à l’un ou l’autre Maçon expérimenté qui sait comprendre et pardonner les erreurs et les errements, qui sait faire la différence entre un ennui passager et une situation qui s’aggrave. Il lui faut donc beaucoup de sagesse et de dévouement. Dans les loges peu nombreuses, cet usage ne peut malheureusement pas toujours être appliqué.

    L’aide que le Frère Aumônier Hospitalier peut apporter n’est pas que matérielle. Il doit en effet apporter son soutien dans les moments difficiles. Mais pour pouvoir exercer sa mission correctement, il faut qu’il soit tenu au courant des problèmes, des difficultés, des épreuves que peuvent vivre certains Frères de l’Atelier, afin de pouvoir agir au mieux de leurs intérêts, de les réconforter, de les aider à la fois spirituellement et matériellement.

    Le Frère Aumônier Hospitalier, comme l’Eléémosynaire au Rite Écossais Rectifié, doit se trouver choisi parmi les Maîtres qui disposent de beaucoup de temps, qui manifestent une grande sociabilité et qui sont capables de pratiquer une chaleureuse solidarité. Cette fonction exigeante et difficile met le Maçon au pied du mur. Les membres de l’Atelier peuvent vérifier, dans le cadre de cette fonction, la réalité de sa fraternité sinon sa façon de comprendre ou de pratiquer les vertus maçonniques.

    Si la coutume lui attribue le rôle de collecter les finances destinées à soulager les infortunes, de visiter et d’assister les Frères malades, le Frère Hospitalier est avant tout le confident des membres de la Loge qui peuvent rencontrer toutes sortes de difficultés, y compris celles d’ordre pécuniaire.

    Les Frères qui subissent une gêne momentanée ou qui se trouvent dans l’impossibilité de payer leur cotisation pour cause de chômage ou de problème personnel exceptionnel et qui sont l'objet d'une détresse particulière doivent s'en ouvrir à l’Hospitalier.

    Les confidences sont couvertes par le secret. Le titulaire de cette charge n’est redevable d’explications qu’au Vénérable Maître de l’Atelier. Lorsque l’Aumônier Hospitalier évoquera  une affaire en Chambre du Milieu, ce sera en parlant d’un frère dans le besoin ou l’affliction, mais sans en préciser le nom.

    Un officier dans le triangle des moyens matériels

    Une Loge est dite juste lorsque cinq l’éclairent, mais sept la rendent parfaite en lui permettant de fonctionner intégralement. Dans la Maçonnerie moderne, le septénaire des offices se complète par les deux fonctions de Trésorier et d’Hospitalier.

    Pour assurer les tâches matérielles, considérées partout et toujours comme élémentaires, le triangle formé par le Vénérable Maître, le Trésorier et l’Hospitalier assure l’assise matérielle et financière de la Loge. Ces tâches sont considérées comme contingentes et subalternes parce qu’elles obligent à la manipulation des métaux, considérés symboliquement comme tels, même sous forme de papier billets.

    Les offices de Trésorier et d’Hospitalier, dont le travail s’effectue autant à l’extérieur qu’à l’intérieur de la loge, peuvent être remplis et cumulés en cas de force majeure.

    Des comptes séparés

    Les oboles recueillies font l’objet d’une comptabilité séparée, indépendante de celle du Trésorier. Les fonds gérés – théoriquement – par l’Hospitalier sont exclusivement destinés à secourir des Frères dans la détresse.

    L’Hospitalier délivre, sur instruction du Vénérable Maître, les sommes destinées aux membres de la Loge dans le besoin. Il est responsable devant le Vénérable Maître de l’emploi des fonds qui lui sont confiés. L’idéal, c’est qu’il puisse rendre compte de sa gestion en faisant un bilan annuel à l’Atelier, par exemple lors de la Tenue dite « administrative » au cours de laquelle les principaux Officiers Dignitaires présentent chacun leur rapport annuel ou lors de l’installation du nouveau collège d’Officiers Dignitaires.

    Sa place et son bijou

    La place qui revient à l’Aumônier Hospitalier dans la loge est la deuxième en haut de la colonne du Nord, à côté du Frère Expert. Le bijou qui orne son sautoir est une bourse aumônière. Mais Jean Ferré fait remarquer que ce bijou peut aussi être une Truelle.

    Pour conclure

    La fonction d’Aumônier Hospitalier n’est pas à prendre à la légère. Le Frère qui accepte de prendre cette fonction doit être conscient du temps dont il devra disposer pour bien remplir sa mission. Régulièrement, il devra se rappeler le sens profond de sa prestation de serment.

    Sa fonction est toute de nuances, de subtilité, de tact, de discrétion et d’efficacité, car il participe et s’associe aux joies et aux peines des membres de la loge en étant le porte parole de l’Atelier. Il doit apporter encouragement et réconfort fraternel à tous, mais éventuellement, avec l’accord du Vénérable Maître, secourir moralement et matériellement tout Frère qui serait dans le besoin.

    Il représente le cœur rayonnant de la Loge. Il met en œuvre le devoir de solidarité fraternelle. Sa fonction montre l’interdépendance des membres de la Loge. Par la pratique de l’entraide, chacun prend conscience à la fois de son état de dépendance et des conditions de son développement. La vie étant un perpétuel échange entre donner et recevoir, l’Hospitalier montre, dans sa fonction, qu’il est nécessaire de redistribuer les dons faits au tronc de solidarité, pour les besoins du groupe.

    Le réconfort qu’il prodigue n’est pas seulement financier mais aussi moral. C’est pourquoi il lui faut toujours faire preuve d’une grande écoute et de qualité de discernement concernant le bien fondé de son action. Les qualités demandées à l’Hospitalier sont de bien connaître les membres de son Atelier. C’est pourquoi, vu son expérience, il est souhaitable, dans la mesure du possible, qu’un ancien Vénérable Maître remplisse cette fonction.

     

    R:. F:. A. B.

     

    Bibliographie 

    Baudouin BernardDictionnaire de la Franc-maçonnerie

    Editions De Vecchi, paris, 1995 - Page 80

     

    Ferré Jean - Dictionnaire symbolique et pratique de la Franc-maçonnerie

    Editions Dervy, Paris, 1994 - Pages 108, 109 ? 273, 274

     

    Ferré Jean - Dictionnaire des symboles maçonniques

    Editions du Rocher, Monaco, 1998 - Page 236, 237

     

    Guigue Christian - La formation maçonnique

    Editions Guigue, Mons-en-Baroeul, 1995 - Pages 140 et 141

     

    Manguy Irène - La symbolique maçonnique du troisième millénaire

    Editions Dervy, Paris, 2001 - Pages 345 et 357

     

    Morata Raphaël - La Franc-maçonnerie : les secrets des objets

    Ch. Massin Editeur, Paris - Pages 48 et 68


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