• * Tenue et vêture

     Tenue et vêture 

    Introduction

    Dans certains Ateliers, tout respectables soient-ils – il semble que l’attitude idéale à adopter et la vêture que les Frères devraient respecter ne soient pas toujours des plus correctes et posent le délicat problème au Frère Expert, aux Frères Surveillants voire au Vénérable Maître, de savoir s’il convient de leur en faire la remarque ou s’il vaut mieux, par le biais d’une planche comme celle-ci, faire prendre conscience de la nécessité de perpétuer la Tradition.

    Le but de cette planche est donc essentiellement de rappeler ce qu’est une Tenue, à ne pas confondre avec la vêture ou tenue vestimentaire ; de préciser les raisons fondamentales d’accepter une tenue vestimentaire adéquate en fonction du type de réunion maçonnique à laquelle on participe.

    Ce sera aussi l’occasion d’apporter quelques précisions sur les décors, sur le port des gants blancs ainsi que sur la manière dont le Profane est introduit en Loge au soir de son Initiation : ni nu ni vêtu.

    Tenue

    Pour Christian Guigue, « Tenue » est le nom donné à la séance de Travail rituel en Loge. Elle est dite « d'obligation » car nul ne peut s'y soustraire. Les Apprentis participent à la Tenue dont les Travaux vont s'ouvrir au premier degré. Les Compagnons accèdent aux séances de travail des premier et deuxième grades ou degrés. Les Maîtres participent aux assemblées des trois niveaux symboliques.

    Il existe également des Tenues « funèbres », d'autres dites « d'installation » ainsi que des Tenues « blanches » au cours desquelles des Profanes ou des membres d’autres obédiences peuvent assister.

    Lorsqu'un Frère de la Loge décède, on dit qu'il passe à l'Orient éternel. Un rituel spécial lui est consacré et dédié au cours d’une Tenue funèbre car on n'accompagne pas de la même manière un Fils de la Lumière et un profane.

    La Tenue d'Installation devrait traditionnellement avoir lieu à l'une ou l'autre fête de saint Jean. On y installe les nouveaux Officiers Dignitaires dans les fonctions stipulées par le rite. Des modalités de politique relationnelle président au fait que des Ateliers dérogent souvent à ces dates. C'est une erreur. Si les solstices se trouvent requis pour que le groupe célèbre cette installation à ce moment d'inversion du sens de la lumière, ce n'est pas sans une raison initiatique primordiale.

    L'argument tendant à justifier l'Installation du Vénérable Maître et de sa Commission d'Officiers Dignitaires à d'autres périodes de l'année, sous couvert que l'on ne pourrait sans cela participer aux installations des Loges amies, ne tient pas.

    Dans la réalité, les relations d'amitié profonde se limitent à trois voire quatre Loges de son secteur géographique. Il suffit tout simplement de désigner quelques Frères pour aller les visiter.

    Dans la Maçonnerie régulière, les Tenues blanches n'existent pas. Ceci relève du fait que les Profanes n'ont en aucun cas l'autorisation d'accéder à nos Travaux et que nous n'avons pas à divulguer, à qui que ce soit, la qualité maçonnique d'un Frère.

    Par ailleurs, si chacun reste libre de « se dévoiler », nul ne peut imposer à l'ensemble des membres de la Loge de se révéler à un ou plusieurs Profanes.

    Dans les obédiences – non régulières – où elles sont pratiquées, on distingue deux types de Tenue blanche :

    • la Tenue blanche fermée, où un conférencier profane présente un exposé à la Loge assemblée,

    • la Tenue blanche ouverte, où Profanes et Maçons se côtoient.

    On ne s'habille jamais maçonniquement lors d'une Tenue blanche ! En d’autres termes, les Frères ne revêtent ni tablier, ni gants blancs, ni sautoir de fonction.

    Vêture

    La Tradition, les habitudes, veulent que lors des Tenues « ordinaires », les Frères soient chaussés de noir, vêtus de sombre (gris foncé, bleu marine ou noir) et qu’ils arborent une cravate de couleur sombre sur une chemise blanche.

    Lors des cérémonies (Initiation, Passage, Élévation, célébration des deux fêtes solsticiales, Tenues funèbres), il est hautement souhaitable - et beaucoup de Loges l'imposent - de porter le smoking ou l’habit en arborant un nœud papillon noir, non seulement parce qu’il s’agit de cérémonies dont la Loge veut souligner le côté solennel et festif, mais aussi sinon surtout pour gommer les différences vestimentaires entre Frères.

    Dans les pays anglo-saxons, lorsque les Frères (Brethren) portent l’habit, ils revêtent alors un gilet et un nœud papillon de couleur blanche.

    Pour participer à une Tenue, nous dit Jean Onofrio, chaque Frère commence donc par se mettre dans une tenue vestimentaire adéquate car la Tenue peut se décliner dans la définition de la vêture. Si le Frère conserve sa vêture profane, il se comporte en simple profane en réunion et néglige la vêture qu’exige le lieu sacré du Temple. Or, la vêture ne doit pas – ne peut pas – être négligée ; elle n’est absolument pas superflue ; elle est même essentielle pour percevoir précisément que la Tenue n’est pas une simple réunion.

    On pourrait dire qu’en Tenue, on doit se tenir et même bien se tenir, ce qui implique de se maintenir, de soigner son maintien.

    S’il est admis de manière courante que « l’habit ne fait pas le moine », les implications psychologiques de cet adage n’ont pas leur place dans la Loge, et se revêtir du Tablier de son grade, ou des décors propres à la charge acceptée en Loge, n’est pas un acte anodin.

    Dire d’une personne ou d’une cérémonie qu’elle a "de la tenue", c’est lui reconnaître une certaine noblesse. Un Frère revêtu de son Tablier est porteur d’une noblesse vis-à-vis de laquelle il n’a que des devoirs. La qualité de Frère donne aux êtres une grandeur qu’ils ne tiennent que de cette qualité, et qui dépasse totalement leur individualité.

    Lorsque nous parlons de « Tenue », nous pouvons nous demander « que tenons-nous ? » ou « qui tient-on ? ». La Tenue est le lieu et le moment, l’instant où l’on se tient, par le rituel, en conformité avec la Règle !

    Tenue

    Dans ce sens, il est vrai que la Règle ennoblit les êtres, et pour ce qui est de la vêture rituelle, on peut dire qu’en Tenue, l’habit fait le moine. Il incarne, il matérialise le changement de destin vécu lors de cette Tenue très particulière qu’est la cérémonie d’Initiation.

    Un passage du Regius [1] est consacré à la description du maintien qui doit être celui du Maçon en Loge. Pour un Franc-maçon, se tenir, c’est se tenir à l’ordre pour accomplir ses devoirs initiatiques, c’est-à-dire mettre en œuvre des préceptes issus de l’esprit de la Règle, démarche qui n’a rien à voir avec l’application d’un règlement !

    Lorsque les Frères sont réunis, ils font vivre la Règle. Il y a une sorte de consubstantialité entre la fraternité et la Règle. Il « suffit » que deux Frères se rencontrent pour que la Règle soit présente, et cette présence est assortie par construction d’un maintien, d’une écoute, d’un éveil, d’une présence, d’une conscience aiguë de l’enjeu, qui est le prolongement de l’œuvre du Principe lors de la Tenue dans la Loge

    Les exigences en rapport avec la tenue en Loge doivent être rapprochées de l’instruction donnée généralement par le Vénérable Maître lors des Tenues : « Prenez place, mes Frères ! », et des quelques vérifications qu’il effectue quant à l’accomplissement de cette instruction (cf. Rituel d’Ouverture des Travaux).

    Lors de l’Ouverture des Travaux d’une Tenue, l’une des vérifications porte sur la qualité des œuvrants et la justesse de leur place, car ceux qui sont présents ne sont pas des spectateurs mais doivent participer par leur énergie vitale à l’invocation de la Lumière par un acte de puissante volonté.

    Les fonctions ayant été invitées à se tenir à leur place lors de l’Ouverture des Travaux (« Prenez place, mes Frères ! » a dit le Vénérable Maître), le Premier Surveillant et le Second Surveillant ayant été invités à parcourir les Colonnes, chaque Frère se met à l’ordre à leur passage, manifestant ainsi la volonté de se conformer à la Règle, et le désir de participer à l’acte rituel de l’offrande qu’est la Tenue.

    A cet instant, ce n’est pas la bonne place des fonctions de création qui est vérifiée mais la qualité des êtres qui incarnent ces fonctions, leur présence de cœur, leur présence lumineuse, leur aptitude à participer à l’œuvre de création, à la Tenue !

    La qualité des œuvrants  requise pour une Tenue, c’est celle de Frère (ou de Sœur). Si l’on rassemble quelques humains, on peut dire qu’ils sont en réunion, éventuellement même en réunion amicale. Mais le lieu de cette réunion est rarement un lieu de récréation. Il faut que ces humains aient été orientés vers la Lumière pour revêtir leur qualité de Frère, immatérielle et intemporelle, et pour pouvoir être introduits dans le Temple et expérimenter le Mystère.

    Ainsi la Loge tient-elle le Temple lors de la Tenue. Ainsi maintient-elle l’émergence rituelle de la source lumineuse qui l’illumine. Par la formulation, par la dénomination des êtres et des choses en pleine Lumière, le Temple est « tenu » et illuminé.

    Se tenir, c’est incarner la rigueur, la droiture, la rectitude donnée par la Règle. Il est donc toujours bon que dans la Loge, les Frères aient de la tenue. Se tenir, c’est favoriser les postures faisant des êtres des symboles, favoriser un rapport avec la Règle.

    La Tenue peut ainsi se décliner de nombreuses manières en commençant par la mise à l’ordre, propre à chaque grade, mais aussi par « tenir sa parole », expression qui s’applique au serment de fidélité donné lors de la cérémonie d’Initiation, mais aussi à la maîtrise du langage.

    Dans le langage courant de la navigation on parle de « tenir » un gouvernail. En Egypte ancienne, le gouvernail est Maât, c’est-à-dire la Règle !

    Venant du latin teneo, tenir signifie entreprendre une navigation, prendre une direction, faisant ainsi de la Tenue un voyage où l’on part d’un point pour prendre la direction d’une Lumière vers l’Orient.

    « Tenir », c’est ainsi voyager sans dévier de sa voie, c’est « tenir la route » ou « tenir le cap ». En tenant sa parole, le Frère met en œuvre la qualité première de fidélité à la parole donnée qui se compare à un cap dont on ne dévie pas.

    Le rituel, fait de toutes les paroles à dire, est ainsi le facteur d’une cohérence, faisant que toutes les parties de la construction tiennent ensemble.

    Le mot « tenue » contient les notions de diriger, de conduire, de maintenir une cohérence. Quand un édifice résiste au temps, c’est qu’il « tient ». Il en va de même pour une Loge : si les Frères sont les pierres du Temple unies par l’amour, la Loge tient comme un édifice solidement implanté sur ses bases.

    La vêture du Récipiendaire

    Ce sont les anciennes instructions qui ont mis l’accent sur l’importance de la tenue vestimentaire du Récipiendaire, la reliant dans un premier temps à une préparation à l’Initiation d’ordre intérieur, qui est celle du cœur.

    Chassé de l'unité existentielle du jardin d'Éden pour avoir succombé à la tentation de goûter à la dualité du Bien et du Mal, le premier couple humain de la Genèse pénètre dans l'univers des éléments, précisément ni nu, ni vêtu.

    Le Récipiendaire est soumis à cet état comme un rappel de celui de sa naissance où il était nu, innocent. Être ensuite revêtu, signifie ici symboliquement, la marque de sa condition humaine et de la sociabilisation qui en découle.

    C'est dans cet état qu'est préparé physiquement le candidat à l'Initiation, c'est-à-dire ni nu, ni vêtu, mais dans un état décent, dépouillé d'une partie de ses vêtements, ce que l'on trouve décrit ainsi : bras et sein gauches découverts, jambe et genou droits mis à nu, pied gauche déchaussé ; avec une longue corde passée autour du cou, terminée par un nœud coulant et les yeux couverts d'un épais bandeau.

    On peut trouver aussi des rapprochements analogiques entre la simplicité du Maçon et la pauvreté évangélique, entre le Récipiendaire pauvre et nu et le Christ dépouillé de ses vêtements, dans les premières divulgations écossaises.

    Dans la société profane, le port des vêtements est une indication du niveau de richesse sociale. Ils accentuent les différences et l'inégalité de fortune. Dépouillé de cette apparence, le candidat est rappelé à son état ontologique de pauvreté.

    Le Récipiendaire ainsi présenté ressent physiquement l'état inconfortable de la dualité, du déséquilibre et de la contradiction, particulièrement éprouvé par la claudication de la marche. Cette préparation physique et vestimentaire marque la distinction et le croisement des courants énergétiques de droite et de gauche du corps humain, établissant une symétrie autour des axes perpendiculaires et verticaux qui se croisent près du sein gauche où est localisé le cœur. La droite est considérée comme active et la gauche comme passive. Le candidat prend conscience de l'obstacle que crée tout dysfonctionnement physique, après cette préparation vestimentaire, qui peut faire penser à celle d'un condamné à mort. Cette mise en scène est faite pour l'aider à se dépouiller de son ego, à mourir à lui-même.

    Le Tablier

    Le tablier des tailleurs de pierre était en peau, assez long et enveloppant. Les représentations anciennes de gravures du 18ème siècle, représentant une Tenue d’admission d’un candidat témoignent de la même disposition.

    Dans les anciennes instructions, le Tablier est considéré comme la marque distinctive du Maçon. Sa peau d’agneau, d’une blancheur éclatante, symbolise la pureté, l’état de virginité virtuellement recouvré par le Néophyte.

    La Maçonnerie adonhiramite explique ainsi le Tablier : Il est le symbole du travail ; sa blancheur nous démontre la candeur de nos mœurs et l’égalité qui doit régner entre nous.

    Le Guide des Maçons Écossais exhorte le nouvel Apprenti, en le revêtant du Tablier, en ces termes : "Recevez ce tablier, que nous appelons habit ; il vous donne le droit de vous asseoir parmi nous, et vous ne devez jamais vous présenter en Loge sans en être revêtu".

    Dans le Régulateur du Maçon, le Vénérable remet le Tablier au nouvel Apprenti en lui disant : "Mon Frère, ce Tablier dont vous serez toujours revêtu en Loge, vous rappellera sans cesse que l'homme est condamné au travail et qu'un Maçon doit mener une vie active et laborieuse".

    Ce symbole de la Franc-maçonnerie spéculative est particulièrement important, car il est un rappel de sa lointaine filiation opérative. La réception et l'enseignement du tablier en peau d'agneau ou en cuir blanc avec les gants blancs, sensibilisent rapidement le Franc-maçon dans son cheminement et demeurent gravés dans sa mémoire comme les premiers symboles qui lui sont expliqués, autant que la première preuve tangible qu'il possède de son admission dans un ordre initiatique. Sorte de rite d'investiture, la remise du Tablier avec les Gants constitue pour le nouvel Apprenti, les insignes distinctifs de son engagement dans le métier.

    Le Tablier et les Gants sont appelés décors. Ils sont en réalité les véritables insignes maçonniques du Travail, alors que le cordon n'est qu'un ornement. Chassé du paradis, le premier homme aurait été revêtu d'une tunique de peau pour cacher sa nudité et poursuivre l'accomplissement de son destin devenu dramatiquement incertain par la gestion de son libre arbitre.

    Jean-Théophile Désaguliers fit une première tentative d'uniformisation du tablier de Maçon vers 1731, en présentant une motion sur la question qui fut adoptée à l'unanimité mais resta sans effet. En réalité, au 18ème siècle, beaucoup de tabliers différaient tant par leur forme que par leur ornementation ; certains étaient très onéreux et savamment décorés, au gré des fantaisies et fortune de leur détenteur. Il fallut l'Union des Grandes Loges des Anciens et des Modernes de 1813, pour que les tabliers maçonniques soient codifiés en fonction des grades pratiqués et que cette codification officielle soit respectée.

    Le symbolisme du tablier

    Le rôle du Tablier est de protéger le Maçon durant le travail, lui évitant d’être blessé par les éclats qui se détachent de la Pierre brute. Ces éclats doivent symboliquement être considérés comme ses imperfections, ses vices et ses passions.

    Le Tablier participe à tout le cycle du Travail maçonnique. Il est une preuve évidente de l'engagement du Maçon et de la consécration qui en a été la réponse. Insigne et vêtement de travail de l'Apprenti-Maçon, le Tablier lui donne accès au chantier du Grand Œuvre de la Franc-maçonnerie.

    Dans le tablier maçonnique, trois éléments méritent d'être analysés pour en percevoir le sens : ses couleurs, sa matière, sa forme.

    Sa couleur

    Le tablier doit être uniformément blanc et sans tache. Cette couleur, si tant est que le blanc soit une couleur, est considérée comme emblème d'innocence et de pureté. Ces nobles qualités expliquent que certains vêtements des prêtres juifs devaient être blancs et que de même, dans les Mystères anciens, le candidat était toujours vêtu de blanc.

    Le blanc synthétise toutes les couleurs ; il a la propriété de diffuser la totalité du flux lumineux qu'il reçoit de la source, dans toute l'étendue du spectre visible. Ce spectre correspond aux faisceaux lumineux de l'ensemble des couleurs : violet, bleu, vert, jaune, orange et rouge.

    Sa matière

    Il doit être en peau d'agneau. "Aucune autre substance, nous dit Albert G. Mackey, telle que le lin, la soie ou le satin ne saurait lui être substituée, sans détruire entièrement le caractère emblématique du tablier".

    Le fait que le tablier soit en peau, outre qu'il réactualise symboliquement le vaste tablier de cuir des ouvriers de certains métiers, rappelle aussi que la peau a toujours été considérée comme un matériau protecteur, un isolant efficace contre certaines influences se rapportant au domaine des forces inférieures. Il s'agit donc, en quelque sorte, par le port du tablier, de mettre à l'abri une région du corps, non pour la retrancher, mais pour orienter son efficience vers d'autres domaines.

    Le Tablier en Loge, protège et met à couvert une région du corps qui n'a pas à participer au Travail maçonnique. Cette région du corps où siègent et s'animent les passions étant circonscrite symboliquement par le port du Tablier, les Travaux de Loge pourront se dérouler avec d'autant plus de sérénité et de profit qu'ils ne subiront pas les interférences nuisibles inhérentes aux agitations passionnelles. Elle doit être subordonnée et éclairée par l'intelligence spirituelle qui, seule, doit participer à la Construction du Temple.

    Toutes les passions profanes, tous les appétits grossiers doivent être exclus progressivement du travail de chacun.

    Sa forme

    Le Tablier de l'Apprenti a cinq côtés (bavette relevée) qui peuvent être mis en correspondance avec les cinq sens. Il est constitué de deux parties de formes géométriques différentes : une triangulaire, qui est la bavette relevée au grade d'Apprenti, symbole du Principe spirituel, et une partie quadrangulaire symbole de la materia prima. La première partie se juxtapose à la deuxième sans la pénétrer, délimitant ainsi la zone d'activité de l'influence spirituelle. Sa partie supérieure est un triangle et sa partie inférieure un rectangle ou un carré. Ces figures géométriques rappellent le quaternaire de la matière surmontée du ternaire de l'esprit, représentant lui, le sommet de la conscience humaine. Au grade de Compagnon, la bavette rabattue exprime le travail de spiritualisation de la matière.

    Les Gants blancs

    Le mot « gant » vient du francique want, qui est probablement passé en gallo-romain comme terme juridique, les Francs ayant eu l’habitude d’offrir un gant en symbole de la remise d’une terre.

    Dans la Maçonnerie adonhiramite, il est donné une explication concernant les deux paires de gants qu'il était coutume de donner au nouvel Apprenti :

    • Ne vous a-t-on rien donné de plus en vous recevant Maçon ?

    • L'on m’a donné un tablier blanc et des gants d'homme et de femme de la même couleur (En note il est précisé que quelques Maîtres ne donnent plus de gants de femmes).

    • Pourquoi vous a-t-on donné des gants blancs ?

    • Pour m’apprendre qu'un Maçon ne doit jamais tremper ses mains dans l'iniquité.

    • Pourquoi donne-t-on des gants de femme ?

    • Pour montrer au Récipiendaire qu'on doit estimer et chérir sa femme et qu'on ne peut l'oublier un seul instant sans être injuste.

    Dans une autre divulgation intitulée "La Franc-maçonne ou révélation des mystères des Francs-maçons", on trouve une explication complémentaire :

    • Pourquoi des gants d'homme si vous devez travailler ?

    • Pour m’apprendre que le travail que j’ai à faire est plus spirituel que manuel.

    • Pourquoi des gants de femme ?

    • Pour en faire présent à celle que la vertu rend la plus digne de mon estime.

    Il est difficile de déterminer à partir de quelle époque est apparu l'usage de remettre en cadeau des gants à une femme digne de l'estime du nouvel Initié.

    On relève que déjà en 1742, Pérau en parle. L'usage est donc très ancien.

    Dans le Guide des Maçons Écossais (p.24), lors de la Réception d'un candidat, le Vénérable prend des gants d'homme et dit au nouvel Apprenti : " Ne souillez jamais la blancheur éclatante de ces gants, en trempant vos mains dans les eaux bourbeuses du vice : ils sont le symbole de votre admission dans le temple de la vertu ".

    De même Le Régulateur du Maçon (p. 33) explique : " Les gants, par leur blancheur, nous avertissent de la candeur qui doit toujours régner dans lame d'un honnête homme, et la pureté de nos actions ".

    La qualité principale d'un gant est sa souplesse et sa capacité à adhérer à la peau comme un étui léger ; cet accessoire vestimentaire est utilisé dans de nombreux proverbes et métaphores.

    Sous l'Ancien Régime, le port des gants obéissait à une codification très stricte. Jeter le gant signifiait pour un noble, défier quelqu'un en duel ; le relever, c'était accepter la provocation.

    Les Gants blancs doivent servir lors de toutes les Tenues. Ces gants suggèrent aussi que les mains d'un Franc-maçon doivent rester pures de tout acte blâmable et que sa conscience s'efforcera de proscrire tous sentiments vils.

    Dans les Loges allemandes, le mot utilisé pour désigner une action est handlung, qui signifie l'œuvre de ses mains, ce qui renforce ce concept symbolique.

    Avant le 12ème siècle, les évêques et les cardinaux dans la liturgie catholique, étaient les seuls admis au privilège du port des gants blancs, symbole de la pureté des œuvres et du cœur.

    Les gants blancs, en Maçonnerie sont un symbole, mais aussi un objet rituel. Reçus le jour de l'Initiation, ils rappelleront les engagements solennellement prêtés.

    Les gants marquent avant tout la pureté rituelle exigée par tout travail rituel. On les porte parce que les mains qui auront à manier les symboles sacrés ne peuvent être celles qui manient les objets profanes dans la vie quotidienne : le sacré doit être préservé de toute profanation.

    Les gants blancs du Maçon sont portés pendant toute la durée des Travaux en Loge, à l'exception des moments consacrés à la Chaîne d'union, où toutes les mains des assistants s'uniront ; elles seront alors dénudées pour favoriser la circulation des subtiles énergies chargées de fraternelles intentions cordiales.

    Les gants blancs ne peuvent être portés rituellement, que par quelqu'un qui s'est purifié avant de pénétrer dans le temple.

    C'est l'affirmation extérieure d'un état intérieur ; c'est en somme une transparence que l'on voudrait rendre visible à tous les yeux. Les mains étant le symbole des actions humaines, les mains pures font des actes purs. Il y a identité entre l'acte et la main.

    Partant de considérations aussi élevées et d'un pur point de vue de la théorie maçonnique, on sera fondé à penser qu'un Frère en Loge, portant rituellement les gants blancs et qui n'aurait pas abandonné ses métaux à la porte du temple, constituerait par là, la matérialisation d'une profanation, en y ayant laissé s'introduire, une mentalité profane.

    Dans la symbolique liturgique, les gants épiscopaux, quelle que soit leur matière (fil, soie, laine), évoquent les mains de Jacob recouvertes de la peau de chevreau (Genèse 27,16). On sait que Jacob signifie supplanteur.

    Dans le port des gants, il y a l'idée d'affranchissement, de succession, de substitution. Le nouvel homme supplante le vieil homme ; la Lumière repousse les Ténèbres.

    L'unité de l'ensemble habillement solennel / décors, porté avec dignité lors des Travaux en Tenue, dégage une impression de calme et de sérénité propice à leur qualité.

    Les Gants peuvent être considérés comme le complément indispensable du Tablier dans la Tenue maçonnique. Tous deux ont la même signification et suggèrent les exigences de la purification.

    Qui gravira la montagne du Seigneur ou se tiendra à sa sainte place ? Celui qui a les mains propres et un cœur pur, écrit le psalmiste [2].

    On peut considérer que le Tablier se réfère au cœur pur et les Gants aux mains propres. Tous deux sont liés à la purification et à la régénération psychique. Cette exigence de purification qui fut symbolisée de tout temps, par les ablutions qui précédaient les anciennes initiations aux mystères sacrés, demeure toujours d'actualité au 21ème siècle.

    Dans les mystères anciens, tout comme chez les juifs et les musulmans, le fait de se laver les mains constitue toujours aujourd'hui une cérémonie préalable, soit à l'Initiation, soit à un acte rituel d'ordre exotérique. Cela signifie et indique la nécessité d'être pur de tout méfait ou acte blâmable pour être admis à participer aux rites sacrés ; on trouve inscrit sur le temple d'une île crétoise : "lave-toi les pieds et les mains, puis entre". Cette inscription illustre bien ce qui précède.

    La robe dans les obédiences féminines

    Plusieurs obédiences féminines françaises ont adopté le port d'une robe en Tenue. Cet usage présente entre autres avantages celui de mettre « vestimentairement » les participantes à l'unisson et au même diapason. Il permet de surcroit d'occulter le cas échéant, les éventuels métaux des unes aux yeux des autres ou, ce qui revient au même, d'annuler les effets pervers de signes extérieurs d'avoirs trop voyants.

    Historique

    C'est au début des années 1950, lors de la création d'une Loge de la G.L.F.F., ayant pour titre distinctif Isis, que plusieurs membres, sous la direction de Gisèle Faivre prirent l'initiative de proposer ce port d'une Robe, lequel fut adopté par toute l'obédience et devint obligatoire pour tous ses membres. Sa couleur variait selon la sensibilité des Ateliers. Certaines furent bleues, d'autres écrues et une majorité noires. Les robes noires seules furent finalement imposées à toute l'obédience, faisant d'une pierre deux coups, en symbolisant par là aussi l'œuvre au noir. Cette option vestimentaire influença d'autres obédiences féminines ou mixtes qui adoptèrent aussi le port d'un vêtement unique pour toutes les sœurs. Ainsi celles de Memphis Misraïm, dont certaines ont opté pour des robes blanches ou safranées et une obédience anglaise mixte pour une robe bleue.

    Lors d'un voyage en Inde des membres de la Loge Isis de la G.L.F.F., celles-ci s'intéressèrent aux Robes que portaient les indiennes de Bénarès. Elles en rapportèrent le patron qui, déplié, prend la forme de la croix de Malte.

    Motifs du choix d'une robe

    Le port de la robe est intéressant en soi car il est un facteur d'unité et d'harmonie visuelle entre tous les membres d'une même loge. La croix que forme la robe à plat est un symbole universel. Elle trace dans l'espace le premier quaternaire de l'expansion créatrice. La croix stricto sensu fait passer du carré au cercle et inversement.

    La nécessité d'une rigueur et d'une unité dans l'habillement, tout en établissant une forme d'égalité entre toutes les sœurs évite toute forme d'exhibitionnisme vestimentaire préjudiciable à la concentration et à l'harmonie générale d'un Atelier.

    L'adoption d'une Robe par toutes est un rappel du principe maçonnique de dépouillement des métaux. Elle a une subtile fonction symbolique de bouclier, évitant de cette façon dispersion et distraction. En outre, elle permet de réaliser plus concrètement, que l'essentiel est dans l'être et non dans le paraître.

    On peut noter aussi que cette Robe est d'une seule pièce, tout comme l'aurait été la tunique de Jésus. Un vêtement reçu lors d'une transmission spirituelle est généralement d'une seule pièce, comme la vie de chacun est unie et unique, liée à son identité. De même on peut considérer que chacun est enveloppé d'un tissu biologique, comparable à une tunique sans couture, symbolisant l'Unité essentielle.

    R :. F :. A. B.

    [1] R. Dez, Regius (manuscrit, 1390), Paris, 1985, p. 56

    [2] Psaume 24,4

     

    Bibliographie

     

    Guigue ChristianLa formation maçonnique

    Editions Guigue, Mons-en-Baroeul, 1995

     

    Mackey AlbertEncyclopedia of freemasonry

    New York, vol. 1, 1996

     

    Mainguy IrèneLa symbolique maçonnique du troisième millénaire

    Editions Dervy, Paris, 2001

     

    Onofrio JeanComment travaillent les Francs-maçons ?

    La Maison de Vie, Fuveau, 2007

     

    PérauL'Ordre des Francs-Maçons trahis et leur secret révélé 1745 (1742)

    Editions Slatkine, reprint Genève, 1980 - pp. 39 - 40

     

    Le Régulateur du Maçon - Heredon p. 33, 5801.

    Editions Rouyat, 1980

     

    Recueil précieux de la maçonnerie adonhiramite 1786

    Editions Rouyat 1975 - p. 22

     

    Le Parfait maçon, les débuts de la maçonnerie française (1736 – 1748)

    Textes réunis et commentés par Johel Courura

    Pub. de l'Université de St Etienne, 1994 - p. 156

     


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