• * Le Grand Architecte de l'Univers

     Le Grand Architecte de l'Univers 

    Introduction

    Le Grand Architecte de l’Univers est une notion fondamentale dans le Rite Écossais Ancien et Accepté. C’est aussi le premier des principes de la spécificité de la Grande Loge de France, de la Grande Loge Nationale Française et de la Grande Loge Régulière de Belgique. C’est une notion assez subtile et souvent mal assimilée. C’est pourquoi j’ai souhaité tracer cette planche pour tenter d’en comprendre mieux la portée.

    Les fondements de la Franc-maçonnerie

    Il est généralement admis par l’Ordre maçonnique et l’ensemble de ses institutions, principalement celles qui sont ou se disent régulières, respectueuses des anciens usages, que les références aux « Landmarks » correspondent à des limites ou règles qu’il convient de ne pas toucher sous peine d’être considéré comme irrégulier.

    Les « Landmarks »

    La première mention écrite du mot « Landmarks » apparaît dans les Constitutions d’Anderson de 1723, à la fin des « Règlements généraux ».

    Il convient de remarquer qu’on ne trouve nulle trace du mot « Landmark » dans les comptes-rendus de la Grande Loge des « Moderns » (de 1723 à 1758) et qu’il n’est cité qu’une seule fois dans ceux de la Grande Loge des « Antients » (de 1752 à 1760).

    Les « Landmarks », règles immuables, sont les limites de l’espace dans lequel nous nous trouvons en Franc-maçonnerie régulière et à l’extérieur duquel nous nous en séparons. Ces règles sont le substrat de l’Ordre. Les Anglo-saxons considèrent les «Landmarks» comme existant depuis des temps immémoriaux et comme étant une sorte de loi non écrite qui exprime l’essence même de l’Ordre et que tout Maçon doit maintenir inchangée.

    Pour Triaca Ublado, il n’y a pas un document unique dans lequel tous les «Landmarks» seraient exposés dans le détail. Ils existaient dans un passé éloigné, bien avant le regroupement des quatre loges à Londres en 1717 et étaient consignés dans des manuscrits qui auraient été volontairement brûlés en 1720.

    Pour Jean Lhomme, il existe de nombreuses listes de « Landmarks » qui ont été publiées depuis la naissance de la Franc-maçonnerie spéculative. Les listes existantes compilées par de nombreux auteurs en comptent entre cinq et septante-cinq !

    Ainsi, la liste dressée par Harry Carr en garde cinq, reconnus unanimement :

    1. le Maçon doit professer la croyance en Dieu, Grand Architecte de l’Univers ;

    2. le Volume de la Loi sacrée doit être présent en loge et ouvert au vu de tous ;

    3. le Maçon doit être un homme libre et d’âge suffisamment mature ;

    4. le Maçon, de par ses actions et déclarations, doit allégeance à l’Etat et à la Franc-maçonnerie ;

    5. le Maçon croit à l’immortalité de l’âme.

    Pour Guy Boisdenghien, ces règles immuables sont au nombre de six :

    1. la croyance en Dieu, Grand Architecte de l’Univers ;

    2. la présence sur l’autel du Volume de la Loi Sacrée recouvert de l'Équerre et du Compas ;

    3. l’interdiction des discussions politiques et religieuses en Loge ;

    4. l’obligation de travailler en Loge ;

    5. le respect des pouvoirs civils de la nation ;

    6. l’observance du secret maçonnique.

    Ces règles sont le substrat de l’Ordre, étant la nature même du lien qui unit les Frères. Il est donc inadéquat de les interpréter en termes profanes comme certains Maçons non réguliers qui, gênés par ces exigences, traitent la Franc-maçonnerie traditionnelle de dogmatique !

    La Franc-maçonnerie Traditionnelle n’est pas dogmatique car l’Initiation vise la réalisation intérieure de l’individu. Cette Initiation ne peut évidemment s’effectuer si l’on est soumis à quelque dogme que ce soit !

    Pour Marius Lepage, « une seule affirmation historique est traditionnellement possible : personne n’a jamais vu un Landmark, parce qu’en réalité, un Landmark n’est qu’un mythe forgé par un poète. Personne ne sait ce que les Landmarks contiennent ou ce qu’ils excluent. Ils ne se rapportent à aucune autorité humaine, parce que tout est Landmark pour l’interlocuteur qui veut nous réduire au silence, mais rien n’est Landmark de ce qui lui barre le chemin ».

    Parmi tous les « Landmarks » anglo-saxons, la croyance en l’existence de Dieu, considéré comme le Grand Architecte de l’Univers est un « Landmark » d’une extrême importance par les discussions qu’il a suscitées.

    La notion du Grand Architecte de l’Univers est, en Maçonnerie, à la fois plus ample et plus restreinte que celle du Dieu des diverses religions.

    Dès son origine, la Franc-maçonnerie, en adoptant cette expression, a ainsi montré sa conception de la divinité dans ses rapports avec le monde et avec l’homme.

    Pour René Guénon, « le Grand Architecte de l’Univers trace le plan idéal qui est réalisé en acte, c’est-à-dire manifesté dans son développement indéfini par les êtres individuels qui sont contenus dans son Etre Universel ; et c’est la collectivité de ces êtres individuels, envisagée dans son ensemble, qui constitue le Démiurge, l’artisan ou l’ouvrier de l’Univers ».

    Les Old charges

    Sont appelés « Old charges » des manuscrits anglais s’étendant du 14ème au 18ème siècle. Cette expression est généralement traduite en français par « Anciens devoirs ». Ils enseignent l’histoire du métier. Les seuls manuscrits du Moyen Age restant sont le « REGIUS » datant de 1390 et le « COOKE » datant de 1425.

    Ces manuscrits qui se ressemblent beaucoup par leur contenu, sont divisés en deux parties :

    • Histoire légendaire de la Maçonnerie identifiée à la Géométrie et aux Arts libéraux ;

    • Exposé des devoirs du métier et de la corporation.

    Les « Old charges » énonçaient des règles qui, avant de devenir des symboles d’un perfectionnement moral et spirituel, étaient, pour les maçons opératifs, immédiatement applicables à leur vie quotidienne et à leur activité professionnelle.

    En 1986, cent treize textes différents de « Old charges » ont été recensés !

    Les Constitutions d’Anderson

    Peu d’années après la formation de la première Grande Loge parurent les Constitutions d’Anderson qui étaient destinées, dans l’esprit de leur auteur et de la Grande Loge qui les commanditait, à remplacer les « Old charges ».

    C’est au cours de l’année 1723 qu’elles ont été publiées. Il s’agit du texte fondateur de la Franc-maçonnerie spéculative mais il est en même temps l’aboutissement d’une longue histoire, celle des Maçons opératifs qui avaient constitué des loges dès le Moyen Age.

    Cet ouvrage, dû au Pasteur James Anderson, contient les charges d’un Franc-maçon qui font toujours autorité actuellement, bien que le texte ait déjà été modifié en 1738, 1813, 1929 et 1989.

    Le G.A.D.L’U. et les différentes obédiences

    La Franc-maçonnerie universelle invoque le Grand Architecte de l’Univers et professe la croyance en l’immortalité de l’âme mais elle n’impose aucun précepte. Aucun culte n’y est enseigné. Aucune vérité n’y est révélée. Société initiatique à base philosophique, elle admet la liberté de conscience et la tolérance mutuelle. Le symbole du Grand Architecte de l’Univers se retrouve dans les principes de base et caractéristiques de la plupart des différentes obédiences, avec quelques nuances qu’il convient de préciser.

    Principes de base de la Grand Loge Nationale Française

    Les principes de base de la Grand Loge Nationale Française sont formulés dans une règle en 12 points qui a pour fondement traditionnel la foi en Dieu Grand Architecte de l’Univers ; la nécessité d’observer les « Landmarks » et de s’instruire des Anciens Devoirs (Old Charges) ; la prestation de serment sur le Volume de la Loi Sacrée ; l’absence de femmes en loge ; le respect des opinions et croyances et enfin l’assistance fraternelle envers les Maçons dans le besoin.

    Caractéristiques générales de la Grande Loge de France

    Obédience spécifiquement masculine, la Grande Loge de France travaille à la Gloire du Grand Architecte de l’Univers. Elle a adopté comme texte de référence les Constitutions d’Anderson et se réfère au Grand Architecte de l’Univers comme expression symbolique du principe créateur, librement interprétable par chacun des membres de l’obédience.

    Principes de base du Droit Humain

    Les principes et les méthodes de travail adoptés par l’Ordre Maçonnique Mixte International le Droit Humain sont ceux des Grandes Constitutions Écossaises de 1786, révisées par le Convent de Lausanne. Cet ordre maçonnique ne professe aucun dogme et travaille à la recherche de la vérité. Il se définit comme une institution initiatique, philosophique, laïque et philanthropique qui se donne pour mission d’œuvrer au progrès de l’humanité. Les loges du Droit Humain travaillent à la Gloire du Grand Architecte de l’Univers et/ou au progrès de l’Humanité.

    Principes de base du rite Émulation

    Le rite Émulation demande à ses participants la croyance au Grand Architecte de l’Univers, la présence sur l’autel des Trois Grandes Lumières (le Volume de la Loi sacrée, l'Équerre et le Compas) ainsi que le respect des Anciens Devoirs.

    Principes de base du Grand Orient de France

    Le Grand Orient de France, la plus ancienne obédience française est l’ancêtre de toutes les obédiences apparues par la suite. Le Grand Orient de France pratique la liberté absolue de conscience. Il laisse à ses membres le choix ou non en une vérité révélée, de pratiquer la religion de leur choix ou de n’en pratiquer aucune. Il pratique la tolérance mutuelle et la lutte contre les dogmatismes et exclusions de toutes sortes.

    Tentons de comprendre comment le Grand Orient de France en est arrivé à abandonner toute référence au Grand Architecte de l’Univers.

    De la suppression de toute référence au Grand Architecte de l’Univers

    Le Grand Orient de Belgique avait déjà retiré l’invocation au Grand Architecte en 1872. C’est en 1877 qu’un pasteur, Frédéric Desmond, proposa au Convent du Grand Orient de France de supprimer lui aussi toute référence au Grand Architecte de l’Univers dans les rituels et dans les travaux. La fine argumentation du pasteur convainquit les décideurs du Grand Orient de France : la croyance en l’immortalité de l’âme et l’invocation au Grand Architecte de l’Univers disparurent de ses loges.

    Depuis cette date, les obédiences maçonniques se divisent entre celles qui reconnaissent  le Grand Architecte de l’Univers et celles qui ne le reconnaissent pas. Elles s’excommunient les unes les autres ! Et puis il y a telle ou telle obédience à tendance religieuse qui affirme que le Grand Architecte, c’est Dieu.

    Comment se reconnaître dans ce débat ? Peut-être simplement en se rappelant que le Grand Architecte de l’Univers est un symbole majeur de toutes les confréries de bâtisseurs depuis l’Antiquité.

    Depuis l’Egypte ancienne, les mentions d’un architecte créateur des lois du cosmos sont très nombreuses. Ce concept symbolique incarne l’harmonie de l’univers dans sa fonction créatrice et il est donc le modèle du Maître d’Œuvre sur le chantier.

    L’exclure ou le considérer comme un objet de croyance, c’est sortir du champ de la Franc-maçonnerie initiatique pour se réduire à une association politique ou para-religieuse.

    Luc Benoist rappelle qu’au « sens ancien, le métier épousait la nature de l’homme et pouvait devenir un art, c’est-à-dire une activité conforme à une certaine perfection.

    Cette conformité donnait au travail un certain prolongement surnaturel qui l’assimilait à la contemplation et à la prière. Elle donnait à l’artisan la conscience de travailler « comme le Grand Architecte de l’Univers » et de devenir, lui aussi, un créateur. Il collaborait humainement à l’œuvre divine ».

    C’est pourquoi, aujourd’hui, il me paraît essentiel de travailler « à la gloire du Grand Architecte de l’Univers », et non pour une institution humaine, pour une idéologie, pour une croyance ou pour un individu.

    Grâce notamment à la présence de ce symbole, nos Apprentis savent qu’ils œuvrent dans une Loge qui fait de l’Initiation son souci majeur et permanent.

    Toute la Tradition des bâtisseurs rappelle un précepte majeur : nous devons tenter de construire comme les dieux l’ont fait au commencement, et c’est pourquoi le modèle et la symbolique du Grand Architecte de l’Univers sont essentiels. Sans lui, il est à craindre que les ouvriers ne construisent que de l’illusoire et des bâtiments sans nulle dimension initiatique.

    Jean Hani nous rappelle que, sur un pilier de Notre-Dame de Paris, est posée une plaque sur laquelle on peut lire la formule « A la Gloire du Grand Architecte de l’Univers », gravée au-dessus d’un pentagone et de Trois Grandes Lumières de la Franc-maçonnerie, la Règle, le Compas et l'Équerre. Ainsi, l’œuvre accomplie a-t-elle été restituée à son véritable auteur, le principe créateur !

    Notre serment

    Lors de notre Initiation, nous nous sommes tous engagés par notre serment à respecter la constitution et le règlement général de notre obédience.

    Prêté la main droite dégantée et posée sur le Volume de la Loi Sacrée afin que nous nous engagions sur ce qu’il y a de plus sacré, notre serment nous enjoint :

    • de garder le secret ;

    • de rester fidèle et discret, c’est-à-dire de ne trahir ni l’ordre maçonnique ni nos Frères ;

    • de persévérer dans le perfectionnement, c’est-à-dire de marcher sur le chemin de l’Initiation.

    Il me semble aussi utile de rappeler pourquoi nous avons prêté notre serment sur la Bible. Depuis toujours, les Francs-maçons prêtent serment sur un livre considéré comme sacré et qui donne à leurs engagements un caractère solennel et irrévocable.

    Dans les pays occidentaux, ce livre a toujours été la Bible mais aujourd’hui un candidat Franc-maçon, dont les racines religieuses personnelles ne se reconnaissent pas dans la Bible, peut prêter son serment d’engagement sur le livre de son choix tel le Coran ou la Torah qu’il n’est pas rare de voir sur l’autel des Loges maçonniques en plus de la Bible.

    Par tout serment solennel, l’homme renonce à une certaine part de sa liberté, ce qu’il fait devant une autorité qui a le pouvoir en tous lieux et en tout temps de connaître un manquement à cette renonciation et de le punir. A ce sujet, René Désaguliers s’est interrogé : « Quelle peut être une telle autorité sinon un Dieu ou le Dieu unique ? »

    C’est cet aspect qui est plus particulièrement marqué dans le mot latin « sacramentum », d’où le terme « serment » dérive directement. « Sacramentum » est lié au mot « sacer » qui signifie sacré ou ce qui appartient au monde divin.

    « S’il est vrai, poursuit René Désaguliers, que le serment est un acte essentiel de la Franc-maçonnerie, nous devons de toute nécessité, nous demander sur quels fondements lui-même repose. La réponse est à la fois simple et redoutable. Pratique extrêmement ancienne de l’humanité, le serment est obligatoirement sanctionné par une autorité supérieure à l’homme, par une transcendance capable de le juger ».

    En Franc-maçonnerie, le serment consiste en une promesse solennelle faite par le Néophyte qui s’engage à garder les secrets de la Maçonnerie et à se conformer en toutes choses aux règlements de l’Ordre, conformes aux lois en vigueur dans le pays.

    Le serment est empreint d’un caractère solennel, de la gravité d’un pacte, du sérieux extrême de l’engagement indissoluble entre celui qui le prête et celui qui le reçoit. Ce serment initiatique a aussi un caractère antique et sacré. Il est prononcé de la libre volonté du Récipiendaire, sans contrainte et devant une assemblée de Maçons témoins qui vont devenir ses Frères et en présence du principe de l’Ordre.

    Ce serment spécifique se décompose en trois parties : une invocation, une promesse, une imprécation. Le plus souvent, et en tout cas dans notre Obédience régulière, l’invocation est faite à la Gloire du Grand Architecte de l’Univers.

    Le serment est prêté le plus souvent sur la Bible, ouverte au prologue de l'Evangile de Jean. On peut considérer que le serment a un caractère d’alliance cosmique avec l'Eternel. C’est une obligation réciproque consentie librement entre l’Ordre et le Néophyte qui est accepté en qualité de nouveau maillon de la chaîne initiatique. Cette promesse au caractère solennel engage l’être tout entier à être fidèle à sa promesse.

    Peut-il y avoir un serment sans la croyance en Dieu ? L’honnêteté historique oblige René Désaguliers à répondre par la négative. Pour les Maçons anglo-saxons, c’était là la raison essentielle de l’obligation pour un Maçon de croire en Dieu. Mais il faut aussi remarquer que les Anglo-saxons font preuve d’une tolérance très large dans le cadre de cette croyance. Le serment est avant tout une affaire de conscience dans laquelle il est impossible de s’immiscer sans se comporter avec une indécence inconcevable.

    La régularité de notre Obédience repose sur huit conditions essentielles. En vertu  même de son adhésion aux idéaux maçonniques traditionnels, trois principes universels définissent le caractère régulier de notre Obédience.

    • La croyance en Dieu, Grand Architecte de l’Univers et en sa volonté révélée, est une condition impérativement nécessaire pour l’admission de nouveaux membres dans une de nos Loges.

    En effet, la Franc-maçonnerie affirme l’existence [1] de Dieu, Etre Suprême qu’elle désigne sous le vocable de « Grand Architecte de l’Univers ». La Franc-maçonnerie ne définit pas l’Etre Suprême. Elle laisse à chacun la liberté absolue de le concevoir mais elle requiert de tous ses membres qu’ils admettent cette affirmation. Cette exigence est absolue et ne peut faire l’objet d’aucun compromis ni d’aucune restriction. La croyance en Dieu, Grand Architecte de l’Univers, demeure, pour toutes les Grandes Loges indépendantes du monde, le critère essentiel de régularité et de fidélité aux « anciens devoirs ».

    • Tout travail maçonnique se fait à la gloire du Grand Architecte de l’Univers et en présence des Trois Grandes Lumières de la Franc-maçonnerie: le Volume de la Loi Sacrée sous l'Équerre et le Compas sur lesquels sont prêtés tous les serments.

    C’est pourquoi les Trois Grandes Lumières de la Franc-maçonnerie doivent toujours être exposées pendant les travaux de la Grande Loge et des Loges placées sous son contrôle. Tous les Initiés doivent prêter leur Obligation sur le Livre de la Loi Sacrée dans lequel est exprimée la Révélation d’En Haut.

    Par ailleurs,

    • notre Obédience est dite « régulière » parce que son origine est régulière, c’est-à-dire qu’une Grande Loge dûment reconnue ou trois Loges au moins, elles aussi régulièrement constituées, ont parrainé sa création ; 

    • une Grande Loge ainsi que les Loges qui lui sont rattachées sont exclusivement composées d’hommes. En effet, la Tradition maçonnique n’admet que des hommes à l’Initiation. Il s’agit du respect strict d’anciens usages qui reflètent une vieille expérience initiatique bien antérieure à la Franc-maçonnerie ;

    • les discussions d’ordre politique ou religieux sont strictement interdites en Loge ;

    • la Grande Loge exerce une souveraineté absolue sur les trois grades bleus (Apprenti, Compagnon, Maître). Il existe en effet un pouvoir administratif qui concerne la promulgation et l’application des statuts et règlements généraux de la Franc-maçonnerie locale.

    Ce pouvoir administratif est exercé, dans notre pays, par la Grande Loge Régulière de Belgique, composée de l’ensemble des délégués des Loges de l’Obédience ainsi que du Grand Comité, organe directeur de la G.L.R.B.

    • Notre groupement, à vocation initiatique, œuvre en observant des règles qui lui sont propres et demeure en symbiose avec le respect de la Tradition et des buts de l’acte initiatique. Les principes des « Landmarks » ou « Anciens Devoirs », coutumes et usages du « Métier de Maçon » doivent être strictement observés.

     

    Le G. A. D. L’U. et la Grande Loge Régulière de Belgique

    La fidélité aux principes de la Franc-maçonnerie régulière implique donc la reconnaissance de Dieu, Etre Suprême que la Franc-maçonnerie appelle traditionnellement le « Grand Architecte de l’Univers ».

    Les Grandes Loges régulières sont dans la logique de leurs objectifs initiatiques lorsqu'elles requièrent de leurs membres, avec la croyance en l’Etre Suprême, une option spirituelle dans un sens qui n’est ni défini, ni explicité : chacun se fait du Grand Architecte de l’Univers, c’est-à-dire de Dieu, une conception qui peut être purement personnelle ou même s’identifier à celle d’une religion.

    Notre Maçonnerie authentique garantit à ses membres la totale liberté de l’esprit en s’interdisant de définir Dieu et en laissant à chacun le droit et le soin d’interpréter, de définir ou de ne pas définir ce qu’est pour lui le Grand Architecte de l’Univers.

    A la Gloire du Grand Architecte de l’Univers

    L’invocation qui préside à l’ouverture et à la fermeture des Travaux des Loges – « A la Gloire du Grand Architecte de l’Univers » – indique clairement que le rite auquel participent les Francs-maçons réunis dans leur Temple place les travaux de réflexion et l’inspiration qui les anime sous une Lumière qui n’appartient pas au monde spatio-temporel. C’est donc affirmer la spiritualité de la Franc-maçonnerie qui pratique ce rite.

    Dès les premiers siècles du christianisme primitif existait, dans l’esprit des philosophes et des théologiens, ce principe créateur qui se manifeste dans les lois de la Nature et qui fait que l’équilibre du monde est intelligible, comme cette « Lumière en tout homme venant au monde » de l'Evangile de Jean, mais dont le sens caché et l’existence même ne se révèlent pas à tous.

    Cette orientation doit nous inciter à réfléchir et à méditer. Nous ne pouvons aller par notre pensée humaine jusqu'à l’origine des choses : nous pouvons seulement avoir l’intuition de leur commencement qui est peut-être seulement le commencement de notre aptitude à penser. Face à cette pensée intuitive et au sens sacré qu’elle contient, certains Maçons continuent à être sous l’influence des philosophes du 18e siècle qui ont développé une pensée rationaliste qui proclame qu’il n’y a rien sans raison, qu’il n’y a pas d’effet sans cause compréhensible par l’esprit humain.

    Si nous rapprochons ces deux pensées, spirituelle et humaniste, nous trouvons le fondement de la tolérance philosophique et religieuse en Maçonnerie. C’est là l’originalité d’une démarche qui allie l’intelligence de la raison, celle du cœur et de l’intuition spirituelle.

    La racine grecque du mot architecte est un composé de « arkhê », qui indique le rang supérieur, le pouvoir, le commandement, et « tektôn », charpentier, constructeur. Le sens d’origine est « constructeur en chef ».

    « En travaillant à la Gloire du Grand Architecte de l’Univers, nous ne ferions que parier sur un sens possible d’un grand Tout, le visible et l’invisible, le créé et l’incréé, le fini et l’infini, au nom duquel nous nous efforçons de construire notre propre unité ». Telle est l’interprétation de Michel Barat, Ancien Grand Maître de la Grande Loge de France.

    Si l’historicité et la date d’apparition exacte de l’expression « Grand Architecte de l’Univers » dans la Franc-maçonnerie n’a qu’une importance relative, je désire quand même y  consacrer le chapitre suivant !

    Le G.A.D.L’U. dans les anciens textes maçonniques

    L’appellation de « Grand Architecte de l’Univers », appliquée à Dieu, est à juste titre considérée comme un trait caractéristique de la terminologie maçonnique. Elle est également caractéristique de la spiritualité maçonnique. Et pourtant, on ne la trouve pas dans les sources les plus anciennes : elle ne figure ni dans les « Old charges » ni dans les parties des anciens catéchismes maçonniques anglais du 17e siècle.

    Il y a cependant plusieurs références de la présence de la quête spirituelle dans la Franc-maçonnerie. La première est le Manuscrit Regius datant de 1390, qui est la plus ancienne charte des « Francs mestiers des bâtisseurs ».

    Puis il y eut la Charte des premières loges d’Angleterre, vers 1704, qui reproduit le texte des anciennes chartes et statuts de Maçons opératifs.

    Une autre se réfère à la Constitution que les loges anglaises réunies en obédience ont voulu se donner. « Les Constitutions d’Anderson » est en effet le premier texte dans lequel apparaît l’appellation de « Grand Architecte de l’Univers ». Il date de 1723 et c’est la première occurrence maçonnique connue de cette appellation de Dieu.

    En fait, cette appellation « Grand Architecte de l’Univers » est beaucoup plus ancienne puisqu’elle apparaît dans « L’Architecture » de Philibert Delorme, dans l’épître aux lecteurs de l’édition de 1567. L’appellation « Architecte » appliquée à Dieu semble de toute évidence fort courante à cette époque et l’épître de Philibert Delorme est bien révélatrice de la manière dont les hommes des 16e et 17e siècles concevaient Dieu comme architecte. Pour eux, le monde est un édifice harmonieux, construit suivant des rapports géométriques et des accords musicaux qui étaient contenus dans l’intelligence divine et que celle-ci a mis en œuvre dans la création.

    Le Traité de la « Divine proportion » de Luca Pacioli (1498) et le « Mystère cosmographique » de Kepler (1596) sont des exemples particulièrement remarquables de mise en œuvre de cette conception tendant à édifier un système complet d’explication mathématico-architectonique de l’univers.

    La conception de Dieu comme architecte n’est pas complètement absente des textes maçonniques d’avant Anderson. Une seule occurrence se trouve dans le Manuscrit Dumfries n° 4 dans lequel il est question d’un commandement donné aux Maçons de « sincèrement honorer et adorer le Grand Architecte du ciel et de la terre ».

    Une des plus anciennes occurrences de l’expression « Grand Architecte de l’Univers » se trouve dans Masonry Dissected de Prichard (1730).

    Dans ces textes, Dieu apparaît comme ayant créé le monde en mettant en œuvre avec « sagesse » la Géométrie ou les Divines Proportions contenues de toute éternité dans son intelligence.

    Le Pasteur Anderson précise une chose très importante pour la spiritualité maçonnique : cette Géométrie selon laquelle il a ordonné le monde, le Grand Architecte l’a inscrite dans le cœur d’Adam, créé à son image.

    Une étonnante cosmogonie opérative

    Pour poursuivre cette étude, je me propose de rapporter le point de vue de Julien Behaeghel concernant la relation entre l’Initiation et le Grand Architecte de l’Univers.

    « Accepter que l’Initiation nous permette de prendre conscience du chemin et du sens de la vie, accepter que ce chemin va de l’inconscience à la conscience, de la Terre au Ciel, c’est accepter implicitement que le sens est celui de l’intelligence et par conséquent que le plan premier est celui qui vient du grand artiste créateur et que ce grand artiste est indiscutablement un architecte de génie.

    Le Grand Architecte de l’Univers exprime le symbole de l’intelligence première et dernière de la manifestation visible et invisible, temporelle et intemporelle. C’est la vision de tous les devenirs possibles. Le plan est indéfini, la vision est universelle et illimitée.

    Le Grand Architecte est l’œil qui prévoit tout ce qui s’est créé, tout ce qui se crée et tout ce qui se créera. Il contient en lui le Soleil et ses rayons, la Terre et son reflet, la Lune et tous les effets qu’elle aura sur le vivant.

    L’œil contient tous les germes de toutes les naissances et c’est bien pourquoi il s’agit de l’œil de l’architecte. Seul l’architecte peut maîtriser l’espace et y inscrire le temps. Seul l’architecte peut construire l’escalier à vis qui réunit Terre et Ciel, autour de l’axe du monde. Seul, il peut tout mesurer, tout étalonner, tout organiser. Pourquoi alors ne pas simplement appeler le Grand Architecte, Dieu ? Pourquoi associer cette image plus à la Terre qu’au Ciel ?

    Précisément parce que le travail maçonnique est un travail de bâtisseur. Le Maçon construit le temple, et le temple contient l’Un et son infini pouvoir mais il contient aussi le plan et l’image d’une autre cité, celle que Jean de Patmos, dans l’Apocalypse, appelle la Jérusalem céleste. Et il faut que ces deux plans, celui de la Terre et celui du Ciel, coïncident pour que le projet réussisse. Le projet est d’inscrire le divin dans l’humain, et l’œil, comme le dit H. Bergson, contient déjà tout le programme à venir.

    Le plan est déjà dans le rayon de lumière qui émane de l’œil du Dieu. On devrait donc dire que c’est plutôt l’humain qui doit s’inscrire dans le divin ; l’humain, ce reflet en devenir d’un plan à jamais incomplet.

    Nous ne pouvons qu’approcher, d’une façon imparfaite, le modèle que nous portons en nous mais que nous ne pouvons ni comprendre ni reproduire. La finitude ne peut contenir l’infinitude. L’œil est ainsi source de lumière et, dans l’optique christique, elle est source de toute vie ».

    « Au commencement était le Verbe et le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu. Par lui tout a paru. En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes [2]… »

    « La complémentarité Verbe – Lumière – Vie est étonnante. Dire et voir sont les deux temps de la création. Il s’agit ici d’une lumière verbale qui est source de vie. Elle est ce point qui concentre en lui force, feu et lumière que la symbolique maçonnique associe à l’étoile. Le Grand Architecte n’est un que dans l’absolu. L’un est la divinité à l’état pur et il nous est impossible de le concevoir sinon comme résultante du deux devenant trois [3].

    Le Grand Architecte sera donc symbolisé entre le Compas et l’Equerre soit comme œil créateur, œil mesureur, soit comme étoile, synthèse morphologique de l’Equerre et du Compas. L’Equerre et le Compas symbolisent d’une part la Terre et le Ciel. Le symbole de l’œil associé à l’Equerre et au Compas est passage de la vision à la forme   le cercle pour le Compas et le carré pour l’Equerre. L'œil créateur est présent dans beaucoup de cosmogonies ».

    Souvent placé au centre de l’Orient et situé au-dessus du Vénérable Maître, le Delta lumineux est la représentation symbolique la plus significative d’un des aspects du principe : c’est l’œil qui voit tout.

    Il s’agit bien évidemment d’un œil frontal, qui correspond au troisième œil, œil du cœur, celui du Grand Architecte de l’Univers, symbole d’omniscience, mais aussi œil d’une conscience intérieure qui est, par reflet, symbole d’une conscience supérieure.

    C’est encore un symbole de vigilance et de clairvoyance qui permet de discerner la réalité de l’illusion. Il symbolise la conscience en permanence en éveil. Cet œil central dans le Delta remplit une position centrale, non seulement dans le triangle, mais aussi par rapport au soleil et à la lune.

    L’œil frontal est un symbole de transcendance.

    Si la représentation du Delta dans son ensemble est considérée comme une représentation du Principe, il est aussi un symbole d’équilibre.

    Cet œil est non seulement celui de la Connaissance, mais aussi d’une conscience éveillée, apte à transcender les contingences de toutes sortes, indispensable à toute vraie élévation spirituelle.

    « Le mariage maçonnique du cercle (Compas) et du carré (Équerre) engendre l’Etoile à cinq pointes, symbole de l’homme divinisé.

    Il s’ensuit que le Grand Architecte de l’Univers est à la fois le cercle de la totalité vide contenant l’œil de la vision et la triade créatrice, la tri-unité, capable d’inscrire l’esprit dans la manifestation visible par l’étoile imprimée dans la pierre. Cette pierre que le Maître devra travailler avec les outils du nombre et de la forme, l'Équerre et le Compas. Telles sont les bases de cette étonnante cosmogonie opérative ».

    René Guénon [4]  indique que la pierre cubique à pointe, considérée sous l’angle de la géométrie plane à deux dimensions, est susceptible de comporter 26 points de façon harmonique et ordonnée, c’est-à-dire la valeur numérique des lettres formant le tétragramme hébraïque (Jod – Hé – Vaw – Hé) qu’il définit comme l’un des noms du Grand Architecte de l’Univers (traduit maladroitement par les chrétiens par « Yahvé » ou « Jéhovah » [5]).

    « Le concept du Grand Architecte de l’Univers est donc celui d’un principe créateur en action dans sa création. Il construit sur terre un devenir de Lumière, une cathédrale intemporelle ».

    Le rituel d’Initiation mène le postulant à sortir progressivement des Ténèbres pour l’amener graduellement à la découverte de la Lumière. Les trois voyages effectués dans la Loge constituent une préparation à cette réception essentielle.

    L’être qui frappe à la Porte du Temple est en quête de Vérité et de retour à l’Unité principielle qui correspond précisément au passage des Ténèbres à la Lumière.

    Selon Guillemin de Saint Victor, la connaissance de la Lumière signifie l’ensemble de toutes les vertus, symbole du Grand Architecte de l’Univers.

    « Le Grand Architecte de l’Univers est trois et sa triade est opérative. Cela veut dire que l’homme initié participe à la dilatation de l’esprit dans l’inconscience du temps. Ou comme l’explique aussi J. Servier dans « L’Homme et l’invisible », que « le seul secret pour l’homme est la volonté d’inscrire sur terre le nom divin en nombre d’homme ». Et pour ce faire, il doit accepter sa condition, d’autant que sa condition est exceptionnelle puisqu'il peut participer à l’œuvre de création en multipliant l’esprit Un dans la matière et le temps, pour participer à la montée universelle de la conscience ».

    Telle semble, pour Julien Behaeghel, la vraie raison d’être de l’Initiation et du symbole : participer volontairement et consciemment à la montée de la conscience. Cela est du reste confirmé par la totalité de la mythologie. L’homme n’a qu’un seul objectif ici-bas : découvrir sa substance éternelle.

    Multiplier l’esprit dans le temps implique obligatoirement de refaire les gestes du Démiurge, c’est-à-dire refaire les signes, redessiner le plan, prononcer, après lui, le nom et le nombre.

    Le Grand Architecte se place dans la lignée des grands fondateurs de l’humanité. En fait il les rassemble tous dans une même symbolique, dans une même essence. Il est un transformateur de matière en lumière avec la différence, par rapport à Osiris, Dionysos, Shiva ou le Christ, que sa transformation est entre les mains de l’homme. C’est l’homme qui accepte de recevoir les outils du ciel et de les utiliser pour construire sur terre une cité nouvelle, calquée sur l’image qui nous est restée de notre passage dans l’Eden. Nous avons en nous l’archétype de la cité de lumière, et il nous appartient de la ressusciter entre Équerre et Compas, c’est-à-dire en lui imprimant notre sensibilité et notre créativité humaines.

    Il ne faut pas confondre le Grand Architecte avec un Dieu anthropomorphe ou appartenant à une religion dogmatique. Le Grand Architecte est l’initiateur du plan. Il est la totalité de tous les tracés possibles.

    Quelques réflexions

    L’invocation du Grand Architecte de l’Univers, au début et à la fin des Travaux en Loge, constitue une notion essentielle à laquelle certains Maçons n’accordent pas toujours assez d’attention pour en ressentir une véritable résonance en eux. Elle contient une vérité qui nous éclaire sur le sens de notre démarche. La pensée maçonnique écossaise affirme reconnaître l’existence de valeurs morales telles que la liberté, la justice, la fraternité, mais aussi celle de valeurs éternelles de l’Esprit incarné dans l’homme telles que l’amour inconditionnel, l’équité, l’acte juste.

    Tout cela est contenu dans la notion de Grand Architecte de l’Univers qui ne peut être un dogme, ni une loi exotérique car la recherche transcende la vie courante, la vie matérielle, le domaine spatio-temporel. Le mystère de l’Etre en nous se fait plus présent.

    Que l’on accepte ou non qu’il puisse exister un principe organisateur, c’est sur la compatibilité entre le monde inanimé et notre conscience que l’on ne peut qu’être d’accord. L’Initiation apprend à l’homme à ne pas se laisser accaparer par l’apparence des choses. Derrière ce qui est apparent se cache le sens réel des choses, et c’est cette recherche qui constitue la « quête » maçonnique que nous appelons la recherche de la Vérité ou la voie de la Connaissance. Le but de l'Initiation maçonnique, c’est passer de la vérité que l’on croit détenir à la vérité que l’on est. Par l’apport de ses rituels, la Franc-maçonnerie donne la possibilité à chacun de se dépasser et d’accéder à un niveau supérieur.

    Le Grand Architecte de l’Univers n’est ni une image anthropomorphe, ni un dieu voyeur qui nous suit partout, ni une idole, ni un objet de croyance, ni un dogme. C’est une idée qui a valeur d’analogie. C’est l’émanation d’un principe, d’une source d’énergie et de lumière. C’est la Parole, au sens d’une intelligence créatrice qui  nous dépasse et que nous portons en nous, que nous cherchons à expérimenter.

    Alors, « travailler à la Gloire du Grand Architecte de l’Univers » ne revient-il pas à exprimer une grande espérance et souhaiter que cette source d’énergie et de Lumière éclaire les échanges entre les hommes ?

    Quant au mot « gloire », je pense le comprendre comme le poids d’une présence invisible mais réelle, souvent décrite dans la Bible comme la Lumière, symbole de Connaissance suprême.

    Puisque la Loge se réunit en son nom, elle souhaite que le Grand Architecte de l’Univers en tant que « symbole de réalité ultime » éclaire ses travaux et oriente les pensées de tous les Frères qui y participent. Rendre gloire, c’est alors replacer les choses et les êtres dans l’ordre universel, à la source de la Lumière éternelle. Tel est le sens que je donne à nos travaux en Loge.

    Invoquer le nom du Grand Architecte de l’Univers, c’est faire mémoire qu’au milieu de notre vie ordinaire, il y a une présence qui nous fait vivre l’instant, que certains appellent éclairs de Lumière, dans un autre monde qui pourtant est déjà là.

    Le « Grand Architecte de l’Univers », est donc une notion qui me paraît essentielle du Rite auquel nous travaillons. Elle laisse à chacun de nous la plus grande liberté de pensée et n’impose aucune limite dans cette recherche de compréhension du principe de vie, non seulement de la vie physique ou de la transmission de la vie, d’une façon rationnelle, mais aussi de la vie spirituelle.

    Ce n’est pas dans la réalité apparente de notre moi que nous trouverons les fondements de notre être et de notre devenir mais dans le symbole du Grand Architecte de l’Univers perçu, non comme un être mystérieux qui préside d’une façon lointaine à la destinée du monde, mais comme une énergie créatrice universelle à la fois transcendante et immanente qui l’habite et lui fait prendre conscience de la réalité intérieure du souffle qui l’anime. Dès lors, la vie spirituelle est une manière d’être face à l’absolu qui est au fond de nous-mêmes et des autres.

    Ma conclusion provisoire

    Depuis l’époque où ont été écrits les Manuscrits Dumfries, le Masonry Dissected de Prichard puis les Constitutions d’Anderson, la Franc-maçonnerie travaille « à la gloire du Grand Architecte de l’Univers » et exige de ceux qui veulent participer à ce travail la croyance en Dieu et en sa volonté révélée. C’est le premier et le principal des « Landmarks » qui définissent la régularité. Supprimer cette exigence, sous prétexte d’associer à l’œuvre maçonnique les hommes de bonne volonté qui ne partagent pas cette croyance, c’est ruiner les fondements de cette œuvre et en dénaturer l’esprit.

    On peut en dire autant de l’attitude qui consiste à conserver la formule du Grand Architecte de l’Univers mais à la vider de son contenu en considérant que chacun peut y mettre ce qu’il veut.

    Vue dans la perspective de l’authentique tradition maçonnique, l’appellation « Grand Architecte de l’Univers » est, au contraire, pleine d’un sens très précis et très riche.

     R:. F:. A. B.

     


    [1] Il serait plus judicieux d’affirmer l’essence de Dieu.

    [2] Jean, I, 1 - 5

    [3] Dans la pensée chinoise, le premier nombre manifesté est le trois.

    [4] Guénon René – Symboles fondamentaux de la Science sacrée - Chapitre XIV – la Tétractys et le carré de quatre - p. 129 et 130

    [5] Pour rendre à Dieu son nom véritable, André Chouraqui utilise dans ses ouvrages une sorte de petit logo traduisant fidèlement le Tétragramme sacré qui, par essence, est ineffable – un nom qui, par définition, appartient au silence : I HV Helohim  (HV étant équivalent à Adonaï)


    Bibliographie

    Behaeghel JulienSymboles et initiation maçonnique

    Editions du Rocher, Monaco, 2000 - page 41 à 50

     

    Dangle PierreLe livre de l’Apprenti

    Editions « La Maison de Vie », Fuveau, 1999 - pages 37 à 41

     

    Ducluzeau Francis - Ethique, sagesse et spiritualité dans la Franc-maçonnerie

    Editions du Rocher, Monaco, 2002 - pages 133 à 142

     

    Maisondieu Edouard - A la Gloire du Grand Architecte de l’Univers

    In Dictionnaire thématique illustré de la Franc-maçonnerie

    Editions du Rocher, Monaco, 1993 - pages 133 à 142

     

    Mainguy Irène - La symbolique maçonnique du troisième millénaire

    Editions Dervy, Paris, 2001

    pages 30, 79, 84, 108, 118, 152, 200, 239, 255, 319,

    376, 382, 386 à 388, 397, 410, 412, 414, 433, 448

     

    Pour aller plus loin

    Bergson H. - L’Evolution créatrice

    Editions Albert Skira, Genève, 1945 - page 70

     

    de Saint Victor Guillemin - Recueil de la Maçonnerie adonhiramique

     

    Ligou Daniel

    Article « Grand Architecte de l’Univers »

    Dictionnaire  de la Franc-maçonnerie

    Editions P.U.F., Paris, 1987 - pages 65 à 71

     

    Hani JeanLe symbolisme du temple chrétien

    Editions Trédaniel, Paris, 1978

     

    Guénon René - Les symboles fondamentaux de la science sacrée

    Editions Gallimard, Paris, 1962

     

    Guénon René - Etudes sur la Franc-maçonnerie et le compagnonnage

    Editions Traditionnels, Paris, 1973

     

    Le Régulateur du Maçon - 1801

    Heredon, Les Rouyat reprint - page 433

     

    Bayard Jean-PierreLa spiritualité de la Franc-maçonnerie

    Editions Dangles, Saint Jean de Braye, 1982 - pages 216 et 264

     

    Benoist LucLe Compagnonnage et les métiers

    Que sais-je ? - P.U.F., Paris, 1980 

     


  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires

    Vous devez être connecté pour commenter